Dieu est mort, foutez-nous la paix !

Il n’y a de blasphème que dans l’esprit du croyant. Celui qui ne croit pas ne blasphème pas : il se rit des superstitions des autres. De haute lutte, cette notion inique de blasphème a été extirpée du droit français pour laisser la place aux libertés de conscience et d’expression. Aucun délit de blasphème ne peut ni ne doit exister. Répétons-le : en France, se moquer des religions n’est pas un crime, c’est une tradition – un exercice de liberté !

Seules sont sacrées les libertés

Deux libertés fondamentales, protégées par le droit français, subissent des attaques d’une inquiétante violence.

La liberté de conscience, bien plus large et profonde qu’une quelconque « liberté de religion », doit être absolue. Je pense ce que je veux, même les plus abjectes saloperies, même les plus sombres conneries. À la lumière de l’instruction et de la discussion, j’accrois mes savoirs et mes connaissances, j’éclaire mes opinions, j’affermis ou déstabilise mes convictions… mais personne ne peut m’obliger ni m’interdire de penser quoi que ce soit. Toutes les pensées, tous les rêves, tous les fantasmes sont permis. Je peux croire en ce que je veux, ou ne croire en rien, changer d’avis, revenir à une opinion antérieure… l’intime de l’esprit ne peut être violé.

De même est absolue la liberté d’expression à propos d’une idéologie, d’un système de pensée, d’une croyance… en particulier, toutes les religions sont parfaitement critiquables. J’ai le droit d’en dire ce que je veux, sur tous les tons. Ce peut être plus ou moins drôle ou sérieux, pertinent ou stupide, élégant ou vulgaire, profond ou provocateur… peu importe ! Pour attaquer une religion, un long essai de philosophie et une blague scatophile ont le même droit à s’exprimer dans l’espace public.

Par conséquent, crier au racisme lorsque l’on s’attaque à une religion relève de l’imposture ou de la stupidité. : il n’y a pas de « racisme » contre une religion parce qu’aucune religion ne peut être assimilée à une race, ce sont des idéologies, des systèmes cohérents de pensée adossés à des références communes et à des rituels [1]. On ne naît pas catholique, musulman, bouddhiste ou autre. L’appartenance à une religion relève du choix [2]. Tout individu a le droit d’en embrasser une comme de la quitter. Imposer une religion, comme c’est très souvent le cas, est criminel.

On a en revanche parfaitement le droit de se railler des bigots ! Mais où s’arrête l’humour et où commence l’insulte ? Très difficile à dire parce que le réel, c’est plus compliqué et moins rigide qu’un dogme qui sert justement à s’éviter de penser. Or le problème des bigots, c’est qu’ils n’ont par nature aucun sens de l’humour. Molière, Voltaire and co. en savent quelque chose ! L’outrance en la matière s’inscrit dans la longue et saine tradition littéraire des pamphlets qui se rient d’autant plus cruellement de ceux qui s’offusquent ou font la moue.

Pour toutes ces raisons, il est insupportable de renvoyer dos à dos ceux qui insultent une religion et ceux qui, en réponse, menacent de violences ou de mort les premiers. Confondre ces deux comportements revient à ériger la foi au-dessus de la loi.

Religion piège à cons

D’autant que l’asymétrie de nature se double d’une asymétrie des moyens. Du côté des médias dits « classiques », les censeurs la bave aux lèvres bénéficient d’odieuses complicités qui encouragent les crimes pour faire du buzz, faisant mine d’oublier qu’un tel comportement ne relève en rien de la liberté d’expression mais du tribunal. Cyril Hanouna, pour ne citer que l’exemple le plus marquant de cette sinistre engeance, n’est pas seulement une insulte au bon goût : il est le vecteur d’un abêtissement de masse et un ferment de guerre civile ; dans un pays normalement constitué, il devrait répondre de ses crimes.
L’agressivité, la haine, les menaces trouvent en outre une bien plus grande caisse de résonnance dans les réseaux sociaux que la satire des religions et les défenseurs des libertés. Ces nouvelles arènes pour répugnants combats de gladiateurs n’ont rien à voir avec les espaces publics axiologiquement neutres si souvent promus avec duplicité. En réalité, les réseaux sociaux, par leur nature-même, jouent le jeu des individus les plus violents à deux titres complémentaires : en permettant, d’une part, la démultiplication des interventions et en encourageant les comportements de meutes enragées ; en offrant, d’autre part, un sentiment d’impunité et d’irresponsabilité qui libère les pulsions les plus basses et les plus morbides. Le lynchage en ligne, bien au chaud derrière son écran, est un odieux exercice de pleutres méprisables.
L’ensemble conduit à une surenchère de vicissitudes dans ce tribunal médiatique qui bafoue toute forme de justice.

La crétinerie, l’inculture et la démagogie ont beaucoup à voir dans ces déchaînements. La désinstruction des jeunes générations laisse des proies faciles aux entrepreneurs identitaires qui n’ont qu’à se baisser pour lever des légions d’imbéciles fanatisés capables de gober n’importe quelle absurdité. Les mots n’ont plus aucun sens, la surenchère visuelle d’horreurs et d’obscénités a réalisé son travail de sape de toute humanité. Comment peut-on encore croire sérieusement qu’un gros barbu omniscient et omnipotent se sente offensé par des dessins ou des vidéos et qu’il ait besoin de débiles fanatiques pour le venger ?

Parce que leur petit égo a été égratigné, ils tentent de réinstituer un délit de blasphème. Pauvres choupinous dont on a osé dire du mal de leur ami imaginaire ! Leurs sentiments ont été heurtés ? Ils peuvent râler ou pleurnicher dans leur chambre mais en aucun cas menacer qui que ce soit. Et puis s’ils veulent vraiment vivre dans un État-nation qui fait passer la croyance religieuse au-dessus des libertés de conscience et d’expression, s’ils n’aiment pas les lois françaises, qu’ils aillent donc vivre dans l’une de ces verrues du Golfe persique où leur idéologie règne et qui ne tolèrent aucun des droits de l’homme que nous avons si chèrement arrachés à la superstition et à l’obscurantisme. Car aujourd’hui, c’est bien de l’islam que se réclament les vierges effarouchés qui appellent au meurtre et, pour certains, passent à l’acte. Et ce sont eux, finalement, qui font le plus de mal à leur religion !

Le catholicisme a survécu à des critiques et caricatures bien plus acerbes que ce que l’on connaît dorénavant ; l’islam n’a qu’à faire de même. Mais voilà qu’encouragé par l’agressivité du second, le premier entrevoit la possibilité d’une revanche et cherche à s’engouffrer dans la brèche. Alors que les religions ont pu inspirer des chefs d’œuvres du génie humain, n’en subsiste dans les discours qui saturent les médias anciens et nouveaux que la part la plus stupide et la plus pathologique. Quelle déchéance ! D’Averroès aux frères Ramadan, d’Augustin à Civitas. Plus dure est la chute. À croire que les mous du bulbe ont réussi leur OPA sur les religions.

Leurs sentiments sont blessés ?
Leur sensibilité est écorchée ?
Leur orgueil souffre ?
Et mon sentiment, ma sensibilité, mon orgueil, à moi, athée ? Entendre à longueur de journée les élucubrations des ravis de la crèche, des grenouilles de bénitiers, des fous de dieux et des benêts béats rêvant de pogroms et de buchers, me heurte de plein fouet !
Je ne menace pourtant personne !
On nous rabâche qu’il y aurait un acharnement contre les croyants, en particulier musulmans. Mais je n’ai vu aucun athée « radicalisé » massacrer plus de 300 musulmans ces dernières années en France. Il n’y a pas non plus d’athées « déséquilibrés » qui attaquent au couteau des croyants presque tous les jours ! Il n’y a pas des milliers d’athées qui se liguent pour pourchasser sur les réseaux sociaux et dans la vie réelle une gamine qui aurait insulté l’athéisme. La violence et le crime sont du côté des religions et de leurs bigots.

Et que l’on ne me dise pas que ce ne sont que des actes isolés, que les lyncheurs n’ont pas compris le « message d’amour » de leur religion, que les religions n’ont rien à voir avec leurs interprètes radicaux… bla bla bla lancinant que ce sophisme du « pas d’amalgame » !  La Saint-Barthélémy et l’Inquisition avaient tout à voir avec le catholicisme. Daesh et les Kouachi ont tout à voir avec l’islam. De même que tous les petits branleurs qui réclament la mort d’une jeune fille au nom de leur dieu outragé représentent parfaitement la manière dont est lu et digéré l’islam dans beaucoup de quartiers et de familles. Non, tous les musulmans ne sont pas extrémistes. Mais tous ceux qui prétendent limiter la liberté d’expression au nom de leur dogme sont des extrémistes. Et ils sont bien trop nombreux.

Défendre la République

L’idéologie qui infuse dangereusement les esprits porte un nom : le communautarisme qui cherche à diviser la nation en groupes homogènes ayant leur codes propres et une haine viscérale envers tous les autres groupes. La religion, tout particulièrement sous une version rigoriste importée, est l’un des vecteurs les plus puissants de la négation et de l’atomisation du corps politique. La République est ainsi assaillie par des idéologies qui cherchent à réintroduire la religion comme censeur de la société, l’islamisme étant la pointe la plus acérée, la plus dangereuse et la plus violente de ce mouvement de fond – mais pas la seule : toutes les religions doivent être ridiculisées, tous les extrémistes doivent être combattus ; face à ces ennemis de l’universalisme, l’anticléricalisme est une preuve de santé mentale.

Au nom d’un « respect » mal défini, on prétend faire passer la croyance au-dessus de la loi, l’égo au-dessus de l’universel, la susceptibilité au-dessus de la liberté, l’individu au-dessus du commun. Ce « respect » de la religion, de la sensibilité, de la « pudeur », etc. n’est qu’une ignoble forfaiture : il légitime l’oppression et la domination par les plus bêtes et les plus violents, il fonde un système mafieux que subissent avant tout les femmes, les homosexuels, les athées et finalement tous ceux qui refusent de se plier à cette idéologie de haine. Ainsi les nouvelles ligues de vertu font-elles la loi dans de nombreux territoires en imposant les comportements qu’elles jugent « décents » ou « conformes » à leur religion et à leur « morale ». Suivant une stratégie évidente, elles tentent de remporter la bataille culturelle, par tous les moyens possibles.

Or intellectuels et responsables politiques, qui devraient être au premier rang de la défense des Lumières contre l’obscurantisme, trahissent leur vocation. L’Université est pourrie de l’intérieur ; le milieu politique – à tous les échelons : Président, ministres, députés, élus locaux, mal nommé observatoire de la laïcité, etc. etc. – a abdiqué tout honneur, préférant la soumission. Début 2020, une gamine de seize ans a plus de courage que tous ceux-là, qui se couchent devant les menaces, espérant des récompenses de leurs nouveaux maîtres. N’ont-ils donc pas conscience qu’il jouent avec le feu dans un entrepôt de dynamite ?

Car la laïcité, la liberté d’expression et la République ne souffrent aucun « en même temps ». Ceux qui se croient fins et distingués en renvoyant dos à dos blasphémateurs et fous de dieux ne sont que des collabos. Selon la formule célèbre, ils pensent que la démocratie, c’est donner 5 min de temps de parole aux Juifs et 5 min à Hitler. Le 29 janvier 2020, sur Europe 1, Mme Belloubet, ministre de la Justice, a osé affirmer : « l’insulte à la religion est évidemment une atteinte à la liberté de croyance ». Peu importent ses tentatives ultérieures de se rattraper, aussi justes puissent-elles être, le mal est fait et rien ne peut l’effacer : la République ne ressort pas indemne d’un tel aveu.

Je critique l’islam, comme je critique le christianisme, le bouddhisme ou le néolibéralisme : ce sont des systèmes de pensée fondés sur des textes, des rituels, des mythologies, des superstitions, etc. Chacun peut croire ce qu’il veut dans le cadre privé, peu m’importe tant qu’il respecte la loi et les valeurs fondamentales de la République. Mieux : je défendrai toujours les individus subissant une forme quelconque de racisme ou une atteinte à leurs droits en raison de leur appartenance réelle ou supposée à une religion, quelle qu’elle soit.

En revanche, personne ne m’empêchera de me moquer d’une religion ou d’une autre ; de toutes les critiquer ; de gueuler que « Dieu est mort » et qu’il faut continuer de tirer sur le corps tant qu’il bouge ; d’attaquer tel ou tel passage d’un livre qui, bien qu’il soit sacré pour certains, ne l’est qu’à leurs seuls yeux ; ni même de combattre des individus précis, non pas en tant que musulmans, catholiques ou autre, mais en tant que porteurs d’un discours et d’une idéologie contraires aux valeurs républicaines : parce qu’ils sont les ennemis de la République, de la laïcité, de la liberté et de l’égalité. Je les combats au nom de l’universalisme républicain, c’est-à-dire de l’égalité de droit et de dignité de tous.

Cincinnatus, 10 février 2020


[1] L’islamophobie, au premier chef, est une tartufferie.

[2] Les comparaisons, bien trop souvent entendues, avec un fantasmatique « lobby homosexuel » sont abjectes. Religion et orientation sexuelle ne sont pas sur le même plan simplement parce que la seconde ne relève pas d’une croyance. Point barre.

Publié par

Cincinnatus

Moraliste (presque) pas moralisateur, misanthrope humaniste, républicain râleur, universaliste lucide, défenseur de causes perdues et de la laïcité, je laisse dans ces carnets les traces de mes réflexions : philosophie, politique, actualité, culture…

10 réflexions au sujet de “Dieu est mort, foutez-nous la paix !”

  1. Le respect des convictions d’autrui oblige aussi à une retenue. La liberté d’expression oblige en corolaire à la retenue, la prudence et la circonspection. Il n’y a pas de liberté absolue sans corolaire dès lors qu’on vit en société. Et il n’y a pas plus de liberté quand la société est atomisée en une multitudes d’individus égocentrés narcissiques.

    Quand à votre assertion « Dieu est mort », vous faite profession de foi en votre propre croyance. Les « dieux » n’ont jamais été aussi prospères et les « dieux » de laïcité et des athées ne sont pas les derniers à obscurcir tout jugement que portent leurs croyants.

    N’oubliez jamais que toute connaissance (y compris scientifiques) et convictions (y compris athées) sont fondées sur des croyances. Il est impossible de conceptualiser le monde sans croyance fondatrice (ontologique).

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    1. Vous venez de heurter ma conviction d’athée, vous n’avez pas fait preuve de suffisamment de « retenue ». Et pourtant, je ne vais vous menacer de mort pour autant.

      Blague à part, vos sophismes vous permettent de confondre liberté d’expression et menaces, « retenue » et censure, science et religion… Bravo pour ce gloubiboulga et tant mieux s’il vous donne l’illusion d’être intelligent. En ce qui me concerne, il relève d’une rhétorique de la soumission aux dogmes et d’une défense de l’obscurantisme. Vous avez choisi votre camp, grand bien vous fasse ; souffrez donc que je ne me plie jamais à votre censure.

      Cincinnatus

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        1. La nuance, si ! Je me bats tous les jours pour rendre compte de la subtilité et de la complexité du réel.
          En revanche, les compromissions avec l’infâme par lâcheté ou idéologie, ça, jamais !

          Cincinnatus

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    1. Bravo pour ce parfait sophisme !

      1/ Vous confondez communisme et athéisme. Pour être cohérent, il vous aurait fallu écrire : « au nom du communisme » (et encore cette assertion-même aurait été hautement discutable). Votre parallèle est donc (volontairement ?) biaisé.
      2/ Les totalitarismes du XXe siècle sont bien plus proches des religions que de l’athéisme. À ce sujet, je vous recommande la lecture de Raymond Aron et Eric Voegelin.
      3/ Vous comparez vous-même l’islamisme du XXIe siècle aux totalitarismes du XXe. Dont acte.
      4/ Parler de « laïcisme » à propos de Staline et Pol Pot m’a bien fait rire, je vous remercie !

      Cincinnatus

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  2. Une fois de plus, relisant une énième fois cette contribution (comme beaucoup d’autres de votre blog), je m’y reconnais tellement que j’en finirais presque par éprouver un diffus sentiment de dépossession… 🙂

    Là, où me semble-t-il, vous négligez une des difficultés essentielles de ce genre de débat autant d’identification qu’identitaire qui pose le droit de ne pas être d’accord avec un compatriote et de le lui dire de la manière qui nous semble la plus adéquate, c’est lorsque vous estimez ou rappelez que :  » On ne naît pas catholique, musulman, bouddhiste ou autre. L’appartenance à une religion relève du choix ».

    En réalité, presque tous les croyants ont été (sans qu’on leur demande leur avis) élevés dans la religion de leurs parents, famille, clan, voire pays (quand il s’agirait d’une théocratie), etc. Et donc, très naturellement, on s’identifie à ce qu’on est devenu (ce qu’on nous a fait devenir).

    Je crois que de tous les musulmans (puisque c’est sous nos latitudes, la religion actuellement la plus active, la plus prosélyte donc la plus problématique) identifiés comme tels ou assignés à cette religion qui est souvent autant culture que culte, une très infime minorité ne le serait que parce qu’on aurait, une fois adulte, toute réflexion faite, décidé de l’adopter. [Je mets à part les occidentaux non musulmans qui se seraient officiellement convertis, par obligation cultuelle, pour pouvoir épouser une musulmane]. Tous les autres sont justement « musulmans de naissance » s’identifiant, naturellement, fût-ce de façon très lâche, à la communauté des musulmans (sinon à l’Oumma) et ne peuvent que se sentir attaqués, stigmatisés, humiliés ou insultés lorsqu’on insultera, à leur yeux, l’islam, l’islam « religion des pauvres et des exploités », comme on nous le serine volontiers, et à laquelle on pourra même trouver quelque fierté à s’identifier, à elle ou par une mystique inverse à ses militants, puisque c’est de leur côté que semble actuellement s’épanouir une dynamique fascinante par sa violence et sa médiatisation (sans parler des pétrodollars affluant).

    Il se trouve qu’en terres chrétiennes, ce sont d’abord des chrétiens (protestants) qui ont su se révolter contre des autorités chrétiennes pour Réformer leur église (16e siècle), puis des chrétiens (notamment en France, début 20e) qui ont osé, dans la logique de leur devise républicaine (liberté, égalité, fraternité) et des ‘Lumières’, et par souci d’une laïcité garante de la liberté d’opinion, instauré la séparation de l’Etat et de l’Eglise.

    On imagine bien que ces Français (le plus souvent chrétiens de naissance même si devenus ensuite non pratiquants ou athées, comme c’est mon cas et celui de millions de nos compatriotes âgés de plus de 50 ans) n’auraient jamais accepté qu’une idéologie extérieure, étrangère à leur monde se permît de venir leur dire comment ils devaient pratiquer leur religion, interpréter leurs textes sacrés ou en modifier les rites ou traditions, voire y renoncer, non ?

    Or, le problème que la France et d’autres pays de l’UE ont avec leur compatriotes ou hôtes musulmans, c’est que ceux-ci s’identifient (fût-ce plus ou moins implicitement) comme musulmans, et s’identifieront d’autant plus comme tels qu’ils se sentiront attaqués, stigmatisés, critiqués ou moqués comme tels. Même si nous leur expliquons que ce n’est pas eux, en tant que personnes, qu’on critique, mais seulement leur, comment dire, foi, croyances, superstitions, etc. ?

    C’est pourquoi, je pense, malgré le dépit que j’en ai ou le désespoir que cela m’inspire, que nous autres, laïques ou athées ou simplement occidentaux non musulmans ni identifiés à cette oumma, n’avons aucune chance d’espérer influencer utilement nos compatriotes musulmans dans leur émancipation ou autonomisation intellectuelle par rapport à leur croyances ou identifications.

    Seuls des intellectuels identifiés comme musulmans pourraient faire évoluer les idées et croyances de leurs coreligionnaires… mais eux-mêmes seraient dans un premier temps tellement peu nombreux qu’il sera aisé aux islamistes de faire pression sur eux (campagne de dénigrement ou menace de mort voire exécution) ou de les traiter d’apostats et donc dorénavant non-musulmans. Surtout qu’une importante frange de notre propre ‘intelligentsia’ (sic) se montre suffisamment aveugle au prosélytisme islamiste et à ses dangers qu’elle est quasiment devenue la complice de ce prosélytisme au point de participer souvent, au côté d’islamistes, aux campagnes d’intimidation contre des intellectuels musulmans assez courageux pour prendre des distances avec leur propre culture arabo-musulmane ( cf. Kamel Daoud et le lynchage collectif auquel se livra contre lui un collectif d’universitaires et autres ‘intellectuels’ ou médiacrates français).

    Bref, il faut considérer que Dieu reste (de plus en plus) vivant pour beaucoup de nos compatriotes, surtout qu’on ne cesse de le leur prêcher dans de plus en plus de lieux de culte (combien de mosquées construites en France ces vingt dernière années ?), et que ce n’est pas demain qu’ils nous « foutront la paix ».

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    1. D’accord avec vous sur (presque) tout sauf… le point central : je persiste, la religion n’est pas de naissance – et vous le dites vous-même : on l’impose à la naissance, ce qui change tout parce que, n’étant pas du biologique, inscrite dans les chromosomes, on peut en changer, la quitter, y revenir… Après, que beaucoup de croyants ne le vive pas ainsi, je le sais bien et c’est justement ce que je combats : l’assignation à résidence identitaire, l’imposition extrinsèque d’un destin en préfabriqué, la manipulation de l’esprit et l’endoctrinement au nom d’une fausse fatalité qui fait naître sous une divinité de pacotille ou une autre écrivant à l’avance une ligne de vie plutôt qu’une autre. Ces mensonges doivent être exhibés pour ce qu’ils sont : des viols de l’individualité.

      Cincinnatus

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      1. Viol de l’intimité, viol mental de mineurs, parfois sexuellement mutilés (par une circoncision), ensuite dressage sectaire d’enfants, abrutissement obscurantiste, culture de la superstition, intimidation, menace de mort et parfois mort, excommunication, séparatisme, etc. Les religions sont tout cela, et, sous nos latitudes, l’islam(isme) qui redynamise mortellement tout cela doit être dénoncé comme tel [réabonné à Charlie depuis 2015, je lui reste fidèle, par pur militantisme anticlérical et résistance au fascislamisme].

        On a bien raison de rappeler qu’une religion n’est qu’une idéologie que l’on doit pouvoir critiquer comme toute idéologie (surtout lorsqu’elle se veut holiste ou totalitaire comme beaucoup de monothéismes), et non une ‘race’ ou une identité à laquelle on ne pourrait qu’être assigné.
        Nous constatons, avec effroi, le retour et la survalorisation mythique du « je suis qui je suis, et fier de l’être », surtout, et c’est plus pervers, si l’on peut inscrire cette revendication identitaire dans de la victimisation (parce qu’on serait « issu d’un peuple qui a beaucoup souffert », d’un pays colonisé, d’une religion méprisée, d’une ‘race’ humiliée, etc. d’une façon plus générale dans le souvenir d’un deuil commun dont on pourra, fût-ce des siècles durant, partager le ressenti(ment) [cf. l’exaltation nostalgique d’une Andalousie conquise puis perdue, etc.]

        L’ennui, c’est que dressé depuis l’enfance dans tel enseignement religieux, on s’identifie fatalement à la communauté de ces croyants, à ce peuple, à cette oumma et l’on prendra toute critique de cette religion, de cette culture, de cette idéologie, comme une critique de soi-même. Comme tout communiste aura longtemps (et sans doute logiquement) considéré toute critique du Communisme comme une critique des communistes. Même lorsque cette critique du Communiste ambitionnait justement de libérer les communistes de leur conditionnement, de leurs œillères.

        Tout homme soucieux de défendre l’élémentaire droit humain à la liberté de conscience doit considérer le prosélytisme religieux (ou l’endoctrinement idéologique), surtout lorsqu’il prend la forme du fanatisme mortifère ou abrutissant, comme un ennemi de l’humanité. Il faut juste savoir que l’aliénation subie par l’endoctriné risque de lui faire considérer cette aliénation comme son identité et qu’à vouloir libérer quelqu’un de ce qu’il croit être lui-même, on risque forcément de le heurter, de lui donner le sentiment d’une agression identitaire (les plus insupportables), etc.
        Il faut juste s’en rappeler lorsqu’on voudra entrer en discussion ou en dispute idéologique avec un tel individu ou, ce sera encore plus difficile, avec un tel idéologue (qui non seulement s’identifie à son idéologie mais aussi au militantisme, pour ne pas dire la croisade même avec laquelle il le défend).

        Néanmoins, et là nous sommes bien d’accord, cette lutte contre le totalitarisme nous incombe à tous, notamment à ceux qui au fil de leur parcours existentiel penseraient avoir acquis assez de Lumières pour éclairer autour d’eux les ténèbres où leurs frères humains seraient encore égarés (c’est à dessein et par pur mauvais et libre esprit que je recours à ces métaphores mystiques 🙂

        Bien à vous. Salut et fraternité !

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