Les lanceurs d’alerte sont à la mode avec, en ce moment, le procès des « Lux Leaks ». Il y a quelques jours, un tweet (que je n’ai pas retrouvé : si quelqu’un met la main dessus, je suis preneur) m’a interloqué. De mémoire, il ressemblait à :
Si je retrouve le lanceur d’alerte qui a dénoncé mes grands-parents juifs, j’aurais deux mots à lui dire.
Comme tous les éditorialistes et hommes politiques qui assimilent les lanceurs d’alerte à des voleurs et à des délateurs, il procède par une analogie qu’il faut impérativement décrypter parce qu’elle devient une modalité un peu trop récurrente de la rhétorique médiatique.
L’analogie, en tant que figure de style, fonctionne par le parallélisme de deux couples dont on compare les rapports internes. Soit le couple (A,B) dont on veut dire quelque chose. Pour ce faire, on exhibe un autre couple, (X,Y), qui appartient plus immédiatement à l’imaginaire commun : il « parle » à tout le monde. L’analogie consiste à dire que A est à B ce que X est à Y. En d’autres termes, que le rapport entre A et B est le même que celui entre X et Y. Comme on connaît bien le rapport entre X et Y, on en déduit par similitude celui entre A et B.
C’est pas clair ?
Alors posons A = lanceur d’alerte, B = entreprise fraudeuse, X = délateur sous Vichy et Y = grands-parents juifs. Le tweet cité dit que le lanceur d’alerte est à l’entreprise fraudeuse ce que le délateur est aux grands-parents juifs.
L’analogie est très communément utilisée en rhétorique parce qu’elle a l’élégance de l’évidence. Elle ramène une situation complexe et ardue à envisager, à une autre situation beaucoup plus simple et déjà connue. Il suffit d’appliquer telle quelle cette connaissance d’un contexte différent pour penser avoir démêlé la situation revêche. Elle efface le sentiment désagréable de déséquilibre devant ce qu’on ne comprend pas et déplace délicatement le problème sur un terrain plus familier. C’est pourquoi elle est fondamentale dans toute entreprise de pédagogie : elle fait comprendre des liens qui n’étaient pas clairs au départ.
Mais en même temps, tout prof pourra témoigner que si elle est très utile, elle ne peut être suffisante. Certes, elle aide à comprendre, mais elle n’explique pas, elle ne démontre pas. Elle peut servir ponctuellement à préciser une intuition mais jamais à fonder un raisonnement.
Parce que l’analogie ment. Elle dit : « ceci est la même chose que cela ». Or on peut jouer à volonté avec le « cela ». Reprenons l’exemple ci-dessus en posant, cette fois-ci : X = témoin d’un viol et Y = violeur. En changeant l’analogie, notre lanceur d’alerte n’est plus celui qui a dénoncé les grands-parents juifs mais celui qui a sauvé quelqu’un d’un viol : de collabo, il devient héros.
En réalité, aucune des deux analogies ne dit quoi que ce soit sur le rapport entre A et B. Elles disent néanmoins beaucoup sur le rapport entre celui qui fait l’analogie et le couple (A,B). L’analogie lui sert à persuader l’autre par un tour de passe-passe digne des meilleurs joueurs de bonneteau.
Mais alors, ces lanceurs d’alerte : collabos ou héros ? Quelle(s) différence(s) avec un délateur ?
D’une certaine manière, l’analogie ci-dessus nous donne des clefs de réponses.
Elle dresse un parallèle entre le lanceur d’alerte et le délateur en s’appuyant sur celui entre les grands-parents juifs et l’entreprise dénoncée par le lanceur d’alerte.
Je répète : un parallèle entre
DES JUIFS SOUS L’OCCUPATION
et
UNE ENTREPRISE FRAUDEUSE.
Il y a de l’indignité à comparer ainsi les lanceurs d’alerte à des délateurs. Pas plus que le témoin d’un viol évoqué plus haut, on ne peut les accuser de « dénonciation inspirée par des motifs méprisables » (définition de « délation » dans Le Petit Robert 2015). Car le critère discriminant est bien celui-ci : les motifs méprisables, n’en déplaise aux relativistes acharnés pour qui tout se vaut et ni morale ni justice n’ont de sens. Ne pas voir la différence fondamentale entre la dénonciation des grands-parents juifs et celle de l’entreprise fraudeuse, c’est manquer cruellement de quelque chose qui peut s’appeler « common decency » (Orwell) ou simplement « bon sens ».
Cincinnatus, 2 mai 2016
Qu’est ce qu’une vraie situation frauduleuse ou un acte frauduleux ?
L’employé qui arrive tous le jours en retard, et quitte son travail 10 minutes avant la fin est il en situation frauduleuse ?
Faisant ainsi moins de prospérité engendrant moins d’impôts c’est bien une fraude ! N’est ce pas ?
Quelle sera la juste définition de la fraude ?
L’impôt éludé qui ne sera pas profitable aux employés publics ?
Quid de la concurrence alors ?
Il est vrai qu’il y a des esprits SUPERIEURS, tels des DIEUX, qui sont au-dessus des communs des mortels susceptibles et soupçonnés de frauder !
CQFD.
Vous êtes drôle dans le registre d’une sorte de fascisme.
Vous n’inventez rien.
Vous N’apportez rien à l’Humanité déjà bien au fond de l’échelle des valeurs humaines.
Oui ce Sont des DELATEURS, Légalisés, MAO en avait plein…
D’ailleurs il en existe plein, on les appelle des « ANONYMES ».
J’aimeJ’aime
Cher Gallo,
me traiter de fasciste ? Vous n’avez honte de rien…
Cincinnatus
J’aimeJ’aime