Tout ça pour ça

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Photo : Joël Saget / Eric Feferberg / AFP

Au lendemain du premier tour, petite revue à vif des résultats peu étonnants [1]. Il y a, bien sûr, beaucoup plus à dire ; les réflexions et analyses plus charpentées viendront en leur temps.

Emmanuel Macron : 27,60 %

Comme prévu, le président sortant obtient le meilleur résultat au premier tour. Sans faire campagne, dans un mépris ouvertement affiché envers les Français, comme si le candidat-président n’avait pas à se mêler de ces basses besognes [2] : défendre un bilan, proposer un programme, incarner une vision, confronter ses idées à celles des autres au sein de l’espace public. Quelle arrogance de petit marquis poudré.

Marine Le Pen : 23,41 %

De nouveau, et sans surprise, la candidate du RN est deuxième, après une campagne d’une discrétion exemplaire. Elle s’est contentée d’engranger les ressentiments, plus profonds encore qu’il y a cinq ans. Sans doute échaudée par son précédent échec, elle a tout fait pour éviter les gaffes et chausse-trappes. Hier soir, elle a clairement annoncé sa stratégie contre Macron : le dépasser sur sa gauche. Tartuffe.

Jean-Luc Mélenchon : 21,95 %

Le chantage au « vote utile » – concept indigne : il n’existe rien de tel qu’un vote « utile » ni encore moins un vote « inutile » ! – a permis au candidat de la France insoumise d’obtenir un très bon score… mais insuffisant pour le conduire au second tour. S’il n’avait pas, depuis cinq ans, trahi la République et la laïcité, dragué les identitaires et les islamistes [3], peut-être l’histoire aurait-elle été différente. Peu importe : il n’y aura aucune remise en question.

Après les trois principaux candidats, les autres, laminés, semblent faire de la figuration. Dommage.

Éric Zemmour : 7,05 %

Alors qu’il y a à peine quelques semaines il était annoncé au deuxième tour, il termine quatrième, très très loin des trois premiers. Si ses tentatives de synthèses idéologiques étaient vouées à l’échec [4], il faut reconnaître que sa campagne a été dynamique et que son ralliement, prévisible, à Marine Le Pen doit être pris au sérieux… bien plus, en tout cas, que celui de Dupont-Aignan il y a cinq ans.

Valérie Pécresse : 4,79 %

Après la disparition du PS en 2017, c’est au tour de ce qui fut le principal parti de droite d’exploser. Pris en tenaille entre, d’un côté, l’héritier naturel de Sarkozy et grand rassembleur des néolibéraux [5], et de l’autre, les tentations Le Pen et Zemmour, LR n’avait aucune chance. Ils ont choisi de bien s’en assurer en se donnant la pire candidate possible, qui ne leur fait même pas atteindre les 5 %. Chirac doit se retourner dans sa tombe… ou se marrer.

Yannick Jadot : 4,58 %

EELV a mené une campagne d’une stupidité confondante, entre les saillies ridicules de Sandrine Rousseau et un Yannick Jadot incapable de s’en dépêtrer. Le parti prétendument écologiste demeure égal à lui-même : une secte [6].

Fabien Roussel : 2,31 %

Le résultat du candidat du PCF, après une campagne de qualité [7] bien qu’elle se soit trop concentrée sur quelques polémiques stériles, est terrible : il montre que la gauche républicaine, laïque, universaliste, humaniste… est inaudible, voire inexistante. Tout est à construire.

Anne Hidalgo : 1,74 %

Le ridicule ne tue pas… heureusement pour le PS qui, après l’humiliation Hamon, se retrouve à moins de 2 % avec la maire de #SaccageParis [8]. Qu’elle appelle, évidemment, sa demi-poignée d’électeurs, à peine plus nombreux que ce qui reste d’apparatchiks solfériniens, à « faire barrage » à Marine Le Pen va de soi pour la gauche castor. Les Parisiens ne peuvent que regretter qu’elle revienne à l’Hôtel de Ville aujourd’hui.

Cincinnatus, 11 avril 2022


[1] « 2022 : encore un coup pour rien », « Une campagne trumpienne ».

[2] « Après cinq ans de macronisme », « Macron le laïque, tartuffe de la République ».

[3] « Mélenchon et LFI : la longue agonie ».

[4] « Éric Zemmour : les synthèses impossibles ».

[5] « Macron : Sarko 2.0 ? ».

[6] « L’imposture EELV ».

[7] « Pourquoi je pense voter Roussel ».

[8] « Anne Hidalgo et #SaccageParis ».

Publié par

Cincinnatus

Moraliste (presque) pas moralisateur, misanthrope humaniste, républicain râleur, universaliste lucide, défenseur de causes perdues et de la laïcité, je laisse dans ces carnets les traces de mes réflexions : philosophie, politique, actualité, culture…

Une réflexion sur “Tout ça pour ça”

  1. Bonjour,

    > S’il n’avait pas, depuis cinq ans, trahi la République et la laïcité,
    > dragué les identitaires et les islamistes [3], peut-être l’histoire
    > aurait-elle été différente.

    Peut-être aussi aurait-il fait quelques % en moins ? Il faut bien reconnaître que cette (lamentable) stratégie ne l’a pas empêché de conserver son socle et même de gagner des voix (en pourcentage comme en valeur absolue) depuis cinq ans. C’est d’ailleurs une bien mauvaise nouvelle…

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