Généalogies de l’état civil – 1. L’état de nature selon Hobbes, Locke et Rousseau

Hobbes Locke RousseauJe m’éloigne quelques semaines de l’écume de l’actualité pour me ressourcer aux œuvres de ces classiques dont les pensées peuvent éclairer nos réflexions. Les théories de l’état de nature et du contrat social occupent une place centrale dans la pensée politique moderne. Quoiqu’elles semblent passées de mode, elles continuent pourtant d’irriguer, de manière presque subliminale, toutes nos conceptions contradictoires et conflictuelles de l’État, de la souveraineté, de la démocratie, de la république, de la citoyenneté… Il ne s’agit donc en rien d’objets surannés, de ratiocinations de philosophes d’un autre âge qui, pris dans les affaires de leur temps, n’auraient plus rien à nous dire. Au contraire ! Si ces systèmes philosophiques répondaient alors à des considérations très concrètes auxquelles devaient faire face leurs auteurs, ceux-ci ont eu l’intelligence de s’en abstraire pour forger des concepts universels qui nous parviennent avec une puissance inchangée. Voilà une raison de plus pour s’y intéresser, si le simple bonheur de côtoyer des géants de la pensée ne suffisait pas à convaincre de l’intérêt de se frotter à ces textes [1].


Sommaire :
Introduction
Des mythes politiques
Hobbes et Locke : la guerre et la paix
L’homme naturel chez Rousseau : un « animal stupide et borné »
L’évolution de l’état de nature chez Rousseau : vers le contrat social


Introduction

Thomas Hobbes (1588-1679) puis John Locke (1632-1704) et enfin Jean-Jacques Rousseau (1712-1778) : en un peu plus d’un siècle, du milieu du XVIIe (le Léviathan est publié en 1651) au milieu du XVIIIe (Du Contrat social date de 1762), les œuvres de ces trois philosophes s’admirent, dialoguent et s’opposent dans des conceptions de l’origine de l’état civil qui sont autant de prouesses de l’esprit humain. C’est avec le troisième, qui se hisse sur les épaules de ses prédécesseurs, que la finesse de la réflexion culmine. En effet, à l’époque de Rousseau, les théories de l’état de nature et du contrat social sont largement connues et déjà un lieu commun de la philosophie politique. La pensée de Rousseau puise ainsi chez Platon, bien entendu, mais aussi chez Montesquieu, l’un des rares auteurs de son siècle qu’il lise, et surtout chez les jurisconsultes fondateurs de l’école du droit naturel d’un côté, chez Hobbes et Locke de l’autre.

Les initiateurs de ce mouvement, sans remonter à l’Antiquité ni à la philosophie médiévale dans lesquelles, en cherchant bien, on trouvera évidemment des annonciateurs, sont les théoriciens du droit naturel et du contrat social, parmi lesquels Grotius et Pufendorf. Ces jurisconsultes développent leur école de pensée avec un objectif politique précis : combattre et remplacer la doctrine de l’origine divine du pouvoir civil afin de libérer le pouvoir royal de l’emprise de l’Église et du pape. Pour ce faire, ils fondent l’état civil sur une origine mythique de nature contractuelle justifiée par un état antérieur nécessitant le passage du pacte civil. De là vient la construction théorique d’un « état de nature » précédant le « contrat social » et qui va devenir un exercice incontournable pour les philosophes du politique, Hobbes, Locke et Rousseau en tête.

Des mythes politiques

L’état de nature est un état de l’humanité dans lequel l’homme n’est encore soumis à aucune autorité politique. Les hommes ne sont néanmoins pas isolés ou séparés de leurs semblables mais dans une indépendance complète, en opposition à la société civile dont le fondement réside dans des conventions qui réalisent la communauté des hommes comme corps politique. Les auteurs utilisent l’état de nature comme une hypothèse, une théorie, un mythe en considérant que, s’il a pu correspondre à une forme de réalité, ce n’est que partiellement ou de manière métaphorique : aucun ne prétend que le genre humain ait jamais été entièrement dans l’état de nature mais certaines conditions peuvent s’en rapprocher, comme ponctuellement certains peuples ou, pour Locke, les princes et les États entre eux [2], les fameux « gladiateurs » de Hobbes [3].

Supposer l’état de nature conduit nécessairement à affirmer que nul individu n’est par nature soumis à l’autorité d’un autre. Ce principe que tous les hommes naissent libres et égaux est parfaitement partagé par tous les partisans du droit naturel et leurs successeurs [4]… et, en toute logique, farouchement combattu par ceux du droit divin qui postulent une hiérarchie de naissance entre les individus soumis à Dieu. Cette égalité, contrairement à ce qu’affirment ses opposants, n’est en rien celle, évidemment absurde, des capacités physiques, mentales ni morales : elle exprime simplement l’idée que chaque individu a reçu de la nature suffisamment de raison pour se conduire lui-même sans avoir à subir la volonté ni l’autorité d’un autre. Car si certains sont plus aptes que d’autres à commander, ces capacités supérieures ne leur confèrent en rien le droit d’imposer leur commandement aux autres. L’égalité naturelle est ainsi une égale liberté.

Par conséquent, le droit de commander ou la souveraineté ne peuvent découler que d’une convention volontaire – d’un contrat qui les institue et par lequel les individus acceptent de se dépouiller d’une part de leur liberté naturelle. Tels sont l’enjeu de la construction de l’état de nature et les nuances de sa conception d’un auteur à l’autre : du type de gouvernement qu’ils veulent légitimer, c’est-à-dire de leurs convictions politiques, dépend la peinture de l’état de nature. Ainsi la description d’une guerre de chacun contre tous chez Hobbes permet-elle la déduction d’une nécessité de l’absolutisme ; ou bien celle d’une paix entre les hommes pour Locke conduit-elle à la limitation de l’État au profit des libertés individuelles.

Hobbes et Locke : la guerre et la paix

Plus précisément, l’homme dans l’état de nature hobbesien se trouve réduit à une condition misérable. Tout étant la propriété de tous, les pulsions d’orgueil et d’envie des individus les poussent à désirer ce qui est en possession de l’autre et à le lui prendre par la force, les plaçant dans un « état de guerre » les uns vis-à-vis de tous les autres.

il est manifeste que pendant ce temps où les humains vivent sans qu’une puissance commune ne leur impose à tous un respect mêlé d’effroi, leur condition est ce qu’on appelle la guerre ; et celle-ci est telle qu’elle est une guerre de chacun contre chacun. [5]

Cet état de guerre de chacun contre tous est une anarchie limitée exclusivement par la loi naturelle qui impose à l’homme le soin de sa propre préservation… mais ne le protège pas d’une condition déplorable que Hobbes rassemble dans une formule devenue célèbre avec ses cinq épithètes qui sonnent comme autant de coups létaux :

il règne une peur permanente, un danger de mort violente. La vie humaine est solitaire, misérable, dangereuse, animale et brève. [6]

N’en jetez plus ! Dans un tel état lamentable, soumis à cette pulsion de peur de la mort violente, les hommes n’ont guère d’autre choix que d’accepter d’aliéner leur liberté pour la sécurité.

En opposition ouverte avec son prédécesseur, Locke, l’ardent défenseur de l’individu, propose une tout autre vision de l’état de nature dans lequel, en vertu de la loi naturelle – qui ici n’est autre que la raison, déjà présente en chacun – les hommes vivent en paix et s’assistent mutuellement.

bien qu’il s’agisse là d’un état de liberté, ce n’est pas pour autant un état de licence ; même si l’homme y possède une liberté incontrôlable de disposer de sa personne et de ses possessions, il n’a cependant pas la liberté de se détruire, non plus qu’aucune créature en sa possession, sauf le cas où un usage plus noble que la simple sauvegarde l’exige. L’état de nature possède une loi de nature qui le régit, et cette loi oblige tout le monde ; la raison, qui est cette loi, enseigne à tous les hommes qui prennent la peine de la consulter qu’étant tous égaux et indépendants, aucun ne doit nuire à un autre dans sa vie, sa santé, sa liberté et ses possessions. [7]

Alors que le passage du pacte social chez Hobbes s’impose comme une évidence du fait de l’état de guerre de chacun contre tous, la difficulté pour Locke est d’aboutir à la nécessité du contrat en partant d’un état de nature où règne la félicité. Loin d’être spécieux, son raisonnement se déroule en plusieurs étapes et se révèle d’une grande finesse puisqu’il repose sur l’élément fondamental de sa pensée : la liberté individuelle, et ses conséquences. Bien qu’ils vivent en paix et soient tous dotés et guidés par la raison en eux, les hommes sont libres de ne pas la suivre et peuvent commettre des crimes. Il est alors du droit de chacun de punir le criminel car il a mis en danger l’ensemble de l’espèce en contrevenant à la loi naturelle de la raison :

car dans cet état d’égalité parfaite, où il n’existe par nature aucune supériorité ni aucune juridiction d’un homme sur un autre, ce qu’il est permis à un homme de faire en exécution de cette loi, tout homme doit nécessairement avoir le droit de le faire. [8]

L’individu lésé a en outre un second droit : celui de la réparation : « tout homme a le droit de punir le coupable, et de se faire l’exécuteur de la loi de nature [9]. » Or, le pouvoir de punition étant commun à tous, les abus sont à craindre et, en l’absence d’un juge supérieur pouvant légitimement arbitrer les conflits, le passage de l’état de nature à l’état de guerre devient possible. Locke en déduit la nécessité du gouvernement civil pour encadrer cet état de guerre potentiel [10]. Il relève en particulier trois éléments dont l’absence dans l’état de nature rend possible le basculement dans un état de guerre : une loi établie, un juge reconnu et impartial, le pouvoir de donner l’exécution d’une sentence [11]. L’inexistence de ces trois facteurs dans l’état de nature pousse ainsi les hommes à le quitter pour instaurer un état civil.

L’homme naturel chez Rousseau : un « animal stupide et borné »

Rousseau conçoit son état de nature à rebours de ses prédécesseurs… en commençant par en réfuter point par point les conceptions. S’il reconnaît la valeur de l’argumentation de Hobbes, qu’il admire (argumentation qu’il lui arrive même de reprendre par endroits), il se montre d’autant plus dur avec lui en ce qui concerne son état de guerre de chacun contre tous qu’il nie être « naturel à l’espèce ». En effet, il s’agit d’un état s’inscrivant dans la durée et dont l’objet est la réparation d’un tort lié à la propriété or il n’y a pas de propriété dans l’état de nature… contrairement, d’ailleurs, à l’idée de Locke pour qui il s’agit d’un droit naturel antérieur à l’état civil – d’une pierre, deux coups, Rousseau contredit simultanément les deux philosophes.

En outre, Rousseau s’oppose encore directement à Hobbes lorsqu’il montre que si l’état de nature était cet état de guerre de chacun contre tous que décrit l’auteur du Léviathan, alors l’espèce humaine serait en danger permanent d’autodestruction – idée absurde puisqu’il n’existe pas d’espèce qui puisse être créée pour se détruire elle-même. De plus, l’orgueil, origine de cette guerre, ne doit pas être pris pour l’amour de soi, à savoir l’instinct de conservation, comme le ferait Hobbes, puisque Rousseau considère plus largement que les passions ont une origine sociale ; le système de guerre de Hobbes reposant sur les passions, il confond les effets et les causes. Enfin, dans la même veine que cette réflexion sur la confusion entre état de nature et état civil, il oppose surtout à Hobbes comme à Locke un argument méthodologique en les accusant de procéder de manière analytique et non généalogique. Et par conséquent de prendre des transformations exercées sur l’homme par la société pour des caractéristiques de l’état de nature [12].

tous, parlant sans cesse de besoin, d’avidité, d’oppression, de désirs, et d’orgueil, ont transporté à l’état de Nature, des idées qu’ils avoient prises dans la société ; Ils parloient de l’Homme Sauvage et ils peignoient l’homme Civil. [13]

Enfin, si la pitié, selon Rousseau, est bien présente chez l’homme à l’état de nature et en est même l’une des caractéristiques, il en exclut la sociabilité, contre les jurisconsultes de l’école du droit naturel. Pour lui, les hommes ne deviennent sociables que lorsqu’ils ont besoin des autres de telle sorte que la sociabilité provient d’un intérêt égoïste et qu’elle appartient nécessairement à l’état civil, non à l’état de nature. Comme la raison, elle n’existe chez l’homme à l’état naturel que potentiellement, sous une forme larvée, et nécessite des conditions liées à l’état civil pour se développer.

La construction de l’état de nature par Rousseau produit ainsi un homme solitaire, n’ayant aucune relation avec les autres hommes qu’il reconnaît à peine pour ses semblables. L’état de nature rousseauiste est ainsi celui de la « tranquillité d’âme », du « calme des passions », de l’indifférence : à l’état de nature, le bonheur de l’homme n’est qu’un bien-être physique correspondant à l’épuisement des pulsions qu’il suit aveuglément, bien loin du mythe du « bon sauvage » auquel on l’attache abusivement ! Formule d’ailleurs absurde puisque bien et mal n’existent pas dans un état de nature par définition étranger à toute « morale ». Il n’y a aucune contradiction entre le Discours sur l’origine et les fondemens de l’inégalité parmi les hommes et le Contrat social : l’état de nature, dans un texte comme dans l’autre, est celui d’un homme qui est à peine un homme – bien plus un animal, dénué de raison et réduit à ses seuls instincts physiques… dans les termes mêmes de Rousseau : « un animal stupide et borné » [14].

L’évolution de l’état de nature chez Rousseau : vers le contrat social

Cet état de nature ne subsiste pas en tant que tel mais, avant d’atteindre le point critique auquel apparaît la nécessité du contrat social, il subit une lente évolution à travers deux étapes intermédiaires qui ne sont plus l’état de nature proprement dit ni encore l’état civil.

Dans la généalogie qu’il propose, Rousseau imagine d’abord que les hommes naturels se regroupent progressivement, conduisant à un état de « troupes » [15]. La naissance d’une forme primitive de sociabilité s’accompagne de l’augmentation des passions qui provoquent ensuite le basculement dans un état de guerre comparable à celui de l’état de nature hobbesien.

C’est ainsi que les plus puissans ou les plus misérables, se faisant de leur force ou de leurs besoins une sorte de droit au bien d’autrui, équivalent, selon eux, à celui de propriété, l’égalité rompüe fut suivie du plus affreux désordre : c’est ainsi que les usurpations des riches, les Brigandages des Pauvres, les passions effrénées de tous étouffant la pitié naturelle, et la voix encore foible de la justice, rendirent les hommes avares, ambitieux, méchans. Il s’élevoit entre le droit du plus fort et le droit du premier occupant un conflict perpetuel qui ne se terminoit que par des combats et des meurtres. La Société naissante fit place au plus horrible état de guerre : Le Genre-humain avili et désolé ne pouvant plus retourner sur ses pas, ni renoncer aux acquisitions malheureuses qu’il avoit faites et ne travaillant qu’à sa honte, par l’abus des facultés qui l’honorent, se mit lui-même à la veille de sa ruine. [16]

Cet état de guerre ne correspond donc pas à l’état de nature, comme le suppose Hobbes, mais à un état transitoire qui conduit l’homme à renoncer à son indépendance naturelle et à fabriquer un artifice pour vivre en paix.

Je suppose les hommes parvenus à ce point où les obstacles qui nuisent à leur conservation dans l’état de nature, l’emportent par leur résistance sur les forces que chaque individu peut employer pour se maintenir dans cet état. Alors cet état primitif ne peut plus subsister, et le genre humain périroit s’il ne changeoit sa manière d’être. [17]

Les premières relations sociales sont donc antérieures au contrat et ce sont elles qui en permettent l’élaboration, une fois l’homme sorti de son état d’isolement naturel. Hobbes et Rousseau s’accordent donc à considérer le contrat comme le fruit de l’usage de la raison, présente pleinement dans l’homme à l’état de nature pour le premier, virtuellement et nécessitant des conditions sociales particulières pour progresser d’après le second.

*

Au terme des évolutions de l’état de nature qu’ils décrivent, l’homme à l’état de nature de Hobbes, de Locke comme de Rousseau se trouve ainsi dans une telle situation de détresse qu’il se voit contraint d’aliéner tout ou partie de sa liberté naturelle pour assurer sa sécurité. C’est l’objet du contrat social.

À suivre…

Cincinnatus, 3 mai 2021


[1] Outre les écrits des auteurs en question, je recommande tout particulièrement au lecteur intéressé l’excellent ouvrage de Robert Derathé, Jean-Jacques Rousseau et la science politique de son temps, Vrin, 1995, dont je reprends ici certaines analyses.

En outre, on peut très bien n’être pas convaincu par tout ou partie de ces développements ; la critique nécessite néanmoins une lecture honnête des textes, bien souvent négligée par les caricatures que subissent les œuvres de certains de ces auteurs – Rousseau en tête puisque le philosophe de Genève a l’art d’aiguiser les haines. Il ne s’agit donc pas pour moi d’embrasser les thèses de l’auteur du Contrat social (quoique j’avoue pour sa prose quelques sympathies évidentes, ne serait-ce que du fait de son intelligence fascinante) mais, comme pour tous les autres penseurs qu’il m’arrive d’étudier ici, de rappeler les nuances et la complexité de sa pensée contre les clichés et les lectures hâtives. Libre à chacun de n’être pas d’accord avec Rousseau : ses idées méritent d’être attaquées, comme toutes les idées… encore faut-il attaquer ce qu’il a vraiment écrit et non pas ce que la doxa a interprété abusivement. On verra par exemple dans ce billet que la notion de « bon sauvage » ou la proposition selon laquelle « l’homme naît libre, c’est la société qui le corrompt », auxquelles on le réduit injustement, ainsi formulées à la va-vite, sont des contresens complets ; ou encore, dans le billet suivant, qu’il n’a rien à voir avec l’image du violent thuriféraire d’une tyrannie de la majorité qu’on lui affuble avec autant de succès que de malhonnêteté.

[2] John Locke, Le second traité du gouvernement, PUF, 2003, chap. 2 §14, p. 12

[3] Thomas Hobbes, Léviathan, Gallimard, Folio essais, 2000, chap. 13, p. 227

[4] C’est véritablement un lieu commun. Voir notamment les premiers développements du chap. 13 du Léviathan pour Hobbes et ceux du chap. 2 du Second traité du gouvernement pour Locke.

[5] Thomas Hobbes, Léviathan, op. cit., chap. 13, p. 224

[6] Ibid, chap. 13, p. 225

[7] John Locke, Le second traité du gouvernement, op. cit., chap. 2 §6, p. 6. Sauf mention contraire, dans toutes les citations, c’est l’auteur qui souligne.

[8] Ibid., chap. 2 §7, p. 7

[9] Ibid., chap. 2 §8, p. 8

[10] Ibid., chap. 3, p. 14-18

[11] Ibid., chap. 9 §124, 125 et 126, p. 90-91

[12] Critique explicite qui revient en plusieurs endroits des textes politiques de Rousseau, voir aussi, par exemple, la note XII du Discours sur l’origine et les fondemens de l’inégalité parmi les hommes, Œuvres complètes t. III, Gallimard, Bibliothèque de la Pléiade, 1964, p. 214-218.

[13] Jean-Jacques Rousseau, Discours sur l’origine et les fondemens de l’inégalité parmi les hommes, op. cit., p. 132

[14] Jean-Jacques Rousseau, Du contrat social, Œuvres complètes t. III, Gallimard, Bibliothèque de la Pléiade, 1964, p. 364. Et aussi, ailleurs :

Ce n’est que par ces lumières qu’il parvient à connoître l’ordre, et ce n’est que quand il le connoît que sa conscience le porte à l’aimer. La conscience est donc nulle dans l’homme qui n’a rien comparé, et qui n’a point vû ses rapports. Dans cet état l’homme ne connoît que lui ; il ne voit son bien-être opposé ni conforme à celui de personne ; il ne hait ni n’aime rien ; borné au seul instinct physique, il est nul, il est bête ; c’est ce que j’ai fait voir dans mon Discours sur l’inégalité. »

(Jean-Jacques Rousseau, Lettre à Christophe de Beaumont, Œuvres complètes t. IV, Gallimard, Bibliothèque de la Pléiade, 1969, p. 936 (en gras, c’est moi qui souligne))

De telle sorte que le « mythe du bon sauvage » est en fait un mythe… au carré ! D’abord parce que Rousseau pense l’état de nature comme une fiction, ensuite parce que jamais il n’a imaginé ainsi l’homme à l’état de nature ! La simple lecture des textes devrait suffire à enterrer définitivement ces idées fausses… mais les mécompréhensions malveillantes ont, hélas, la peau dure.

[15] Voir les premières pages de la « Seconde partie » du Discours sur l’origine et les fondemens de l’inégalité parmi les hommes, op. cit., p. 94-104

[16] Jean-Jacques Rousseau, Discours sur l’origine et les fondemens de l’inégalité parmi les hommes, op. cit., p. 176

[17] Jean-Jacques Rousseau, Du contrat social, op. cit., p. 360. Par ces mots s’ouvre l’important chapitre 6 « Du pacte social » : voir le billet suivant.

Publié par

Cincinnatus

Moraliste (presque) pas moralisateur, misanthrope humaniste, républicain râleur, universaliste lucide, défenseur de causes perdues et de la laïcité, je laisse dans ces carnets les traces de mes réflexions : philosophie, politique, actualité, culture…

3 réflexions au sujet de “Généalogies de l’état civil – 1. L’état de nature selon Hobbes, Locke et Rousseau”

  1. Bonjour,
    je vous lis régulièrement avec intérêt et plaisir.
    J’aurais quelques questions: pour nos philosophes, dans l’état de nature, quelle est la place de la « famille » (si ce terme a un sens); comment, même conceptuellement, imaginer l’homme sans « famille » dans l’état de nature; la « famille » n’est-elle pas le lieu du premier contrat social?
    Bien à vous,
    Pierre

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    1. Bonjour,

      Excellente question, que nos trois philosophes traitent en effet explicitement en y consacrant souvent un chapitre entier (voire plusieurs en différentes œuvres), en général sous l’angle du pouvoir paternel comme modèle possible et discutable du pouvoir despotique.

      Pour Hobbes, voir par exemple :
      – chap. 20 du Léviathan, « De l’autorité paternelle et de l’autorité despotique ».
      http://classiques.uqac.ca/classiques/hobbes_thomas/leviathan/leviathan.html
      ou en anglais :
      https://en.wikisource.org/wiki/Leviathan/The_Second_Part#Chapter_XX:_Of_Dominion_Paternal_and_Despotical
      – chap. 9 du De Cive (Du citoyen), « Du droit des pères et des mères sur leurs enfants ; et du royaume patrimonial ».
      http://classiques.uqac.ca/classiques/hobbes_thomas/le_citoyen/le_citoyen.html
      ou en anglais :
      https://en.wikisource.org/wiki/De_Cive/Chapter_IX

      Pour Locke :
      – chap. 6 du Second traité du gouvernement, « Du pouvoir paternel ».
      http://classiques.uqac.ca/classiques/locke_john/traite_du_gouvernement/traite_du_gouver_civil.html

      Pour Rousseau :
      Le sujet est traité notamment dans le Discours sur l’origine de l’inégalité et dans le Contrat social, par exemple livre I chap. 2 « Des premières sociétés ».
      https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k61325137/f56.item

      Cincinnatus

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