Anne Hidalgo et #SaccageParis

640px-paris_28xve29._-_la_tour_eiffel_28titel_op_object292c_rp-f-f19721Anne Hidalgo est formidable ! Parisiens, nous avons une chance extraordinaire de l’avoir pour maire ; d’ailleurs, nous ne nous y sommes pas trompés, en la réélisant haut la main l’année dernière. La légitimité de notre chère édile, plébiscitée par l’ensemble de ses administrés, est inattaquable… avec une abstention somme toute négligeable : à peine les deux-tiers des électeurs sont restés chez eux. Une broutille évidemment due à la crise sanitaire et en aucun cas à l’offre politique de très haut niveau – notre bien-aimée Anne en tête.

L’épiphénomène « #SaccageParis », né sur les réseaux sociaux il y a quelques mois, ne doit pas faire illusion. Se faisant passer pour des citoyens « apolitiques », une poignée d’individus mal intentionnés cherche à discréditer la municipalité par une odieuse campagne de calomnies. Leurs mensonges éhontés ont été très vite dévoilés pour ce qu’ils sont : une manipulation grossière de fachos d’extrême-droite, sans doute téléguidés par une puissance étrangère comme la Russie, la Chine ou la Corée du Nord, afin de déstabiliser celle qui ferait une remarquable candidate à l’élection présidentielle. Anne Hidalgo doit vraiment faire peur pour qu’ils en arrivent là !

Les ficelles sont évidentes : après tout, comment de vrais Parisiens pourraient-ils s’opposer à cette politique qui fait unanimement leur bonheur ?

Ainsi, par exemple, des rumeurs au sujet de la propreté de la capitale française. Billevesées ! Paris n’est pas plus sale qu’avant. La preuve : rappelons-nous des « motocrottes » de l’époque Chirac ! Depuis, rien n’a changé… enfin… si… en mieux… évidemment ! Comme les élus parisiens l’expliquent très clairement sur les réseaux sociaux où ils passent le plus clair de leur temps au contact des vraies gens : ce n’est pas la faute de la Ville si les trottoirs ne sont pas nettoyés suffisamment souvent – c’est celle des Parisiens, des touristes et des oiseaux qui les salissent trop vite ! Dans ces circonstances, la pédagogie est évidemment plus efficace que le déploiement de moyens supplémentaires jamais suffisants. D’où l’importance de continuer de réduire les effectifs consacrés à la propreté des rues, ou à l’entretien et à la surveillance des parcs et jardins, pour augmenter les moyens humains et financiers des services de communication. Il vaut mieux recruter des jeunes communicants inspirés et inspirants, innovants et créatifs, que des éboueurs, des égoutiers et des gardiens de parcs ! Bienvenue dans la start-up capitale !

De toute façon, en matière de propreté, la mauvaise foi des diffuseurs de #SaccageParis n’a pas de limite, qui relaient notamment, avec une complaisance fascistoïde, des photographies de graffitis censées illustrer un hypothétique mauvais entretien des murs parisiens. Ces réacs bas-du-front tentent ainsi, pitoyablement, de faire passer pour des incivilités les actes d’embellissements artistiques de citoyens innovants et engagés. Le street art contemporain qui s’expose à ciel ouvert, pour le bonheur visuel de tous, place notre merveilleuse ville au niveau de toutes les grandes métropoles mondiales. De Brooklyn au XXe arrondissement, plus de frontière, la même communion dans la bombe de peinture ! Il est largement temps de rompre avec cette culture bourgeoise oppressive et verticale pour laisser s’exprimer sans frein l’horizontalité des cultures sous toutes leurs formes.

Parce qu’ils nous fatiguent, tous ces aigris qui voudraient mettre Paris sous cloche, en faire une ville-musée, figée dans le temps haussmannien, ou plus ancien encore ! Allons donc ! Une ville est comme un organisme vivant, elle doit évoluer pour continuer de vivre ! Et, quitte à les choquer, ces boomers moribonds, peu importe dans quel sens elle évolue, puisque toute évolution est, par définition, dans le bon sens ! Du moment que ça bouge, du moment que ça change, c’est bien ! Des concepts surannés comme le « patrimoine » n’ont plus aucune signification à l’heure du numérique et de la diversité culturelle ! Les vieilles pierres ne sont pas belles parce qu’elles sont vieilles mais parce que nous décidons qu’elles sont belles ! Et si nous décidons qu’elles ne le sont plus, il n’y a aucune raison de continuer de les entretenir ! Même chose pour le mobilier urbain : les bancs et kiosques Davioud verts, les lampadaires verts, les fontaines Wallace vertes, les colonnes Morris vertes, les bouches de métro Guimard… vertes : quelle tristesse ! On se contrefiche que tout cela soit « beau et fonctionnel » : nous ne voulons que du ludique et du transgressif ! De la couleur ! De la jeunesse ! De la vie ! Et qu’on ne vienne pas pleurnicher sur une quelconque « âme de la ville » qui serait mise à mal ! Nous ne sommes liés à rien ! Nous avons le droit de faire ce que nous voulons de ce dont nous héritons ! Il vaut mieux consacrer tout l’argent à la culture vivante, à des constructions modernes, à notre génération, plutôt que d’en gaspiller pour des morts (ou des vieux) qui n’en ont plus rien à faire – et dont nous n’avons plus rien à faire non plus ! C’est évident, c’est rationnel, c’est raisonnable : place aux jeunes, place aux vivants ! De l’audace ! Soyons vraiment progressistes !

Ainsi de ces places auparavant tristes à mourir, comme celle du Panthéon, la pire de toutes, entièrement dominée par cet affreux cimetière nationaliste pour vieux mâles blancs qu’on ferait mieux de dynamiter pour coconstruire à la place un espace convivial de ludicité urbaine. Horriblement minérale, la place a été nettement améliorée par l’ajout de grands arbres en pots qui, même s’ils meurent en quelques semaines, égaient un peu le quartier. Et puis la solennité écrasante du lieu a été judicieusement cassée par l’installation d’un mobilier urbain contemporain inspiré de l’esthétique des aires d’autoroute : la disruption est totale et tellement ludique, avec les bancs en gravats façon cimetière mérovingien (clin d’œil transgressif au Panthéon, à Clovis, à sainte Geneviève…). Une réussite absolue. Comme toutes les places rénovées dernièrement : la Bastille, la République, etc. etc.

En juger, comme le font les petits esprits aigris, par le critère du « Beau » est risible. Dans quel siècle pensent-ils vivre ? N’ont-ils pas compris que cette notion passéiste signe de manière flagrante leur idéologie de bourgeois d’extrême-droite ? Depuis les travaux définitifs, aussi bien des artistes contemporains que des sociologues de la gauche déconstructiviste – la seule gauche qui soit de gauche –, il n’y a plus à en discuter : le Beau, c’est réac, point barre. Seuls comptent les concepts mis en œuvre par les artistes et architectes engagés au service de l’action citoyenne et de la politique menée par la municipalité, nouveau mécène des arts – Anne Hidalgo, Médicis 2.0 ! Cette ligne guide toute la pensée urbanistique actuelle à Paris. Car, là plus encore qu’ailleurs, dans la grande arène concurrentielle globalisée, Paris doit relever le défi que lui lancent les autres métropoles mondiales. Accuse-t-on New York, Londres, Berlin, Pékin ou Tokyo d’être moches ? Étant donné que tout est fait pour que Paris ressemble le plus possible à toutes les autres grandes villes du monde, comment diable peut-on la qualifier ainsi ? C’est ne rien comprendre au Progrès ni au sens de l’Histoire !

Et dans cette course au plus grand rayonnement international possible, le fun apparaît comme l’un des critères principaux. Pour les Parisiens, comme pour les touristes, Paris doit être un terrain de jeu. Tout doit être mis en œuvre pour qu’ils s’y sentent bien, pour qu’ils s’y amusent. « Paris est une fête » ! Paris est même un immense parc d’attraction, pour la joie de tout le monde. La multiplication d’événements festifs, depuis la mandature de Bertrand Delanoë, pâle brouillon de l’excellente Anne Hidalgo, doit être vue par les générations futures comme l’évolution la plus réjouissante à laquelle on ait pu assister depuis la fondation de la ville ! Courageusement, la Maire ne regarde d’ailleurs pas à la dépense pour nous régaler ainsi régulièrement de projets plus inattendus les uns que les autres – et les plus prestigieux : les jeux olympiques de 2024 seront, de ce point de vue, une réussite extraordinaire, à n’en point douter ! –, qui participent à la renommée de la Ville-lumière (et au bonheur des habitants) bien davantage que toutes les vieilleries poussiéreuses.

Toutes les initiatives pour en accroître encore le caractère éminemment festif sont bienvenues ; toutes les opportunités doivent être saisies, sans arrière-pensée ni scrupule petits-bourgeois. Ainsi, tout bien considéré, la crise sanitaire, aussi horrible puisse-t-elle sembler aux pessimistes invétérés, s’est retournée, presque miraculeusement, en une heureuse chance, avec la naissance des terrasses « éphémères », appelées à se pérenniser. Transformer les trottoirs et les places de parkings en espaces de convivialité, de plaisir et de dégustation éthylique : quel génie ! La démonstration est faite qu’ils ne pouvaient servir utilement et agréablement à rien d’autre. Quant aux râleurs habituels, ils sont de toute façon inaudibles ; si entendre les autres s’amuser toute la nuit les dérange à ce point, ces sinistres rabat-joie, qu’ils aillent vivre à la campagne !

Paris n’est pas pour eux : elle est pour ceux qui vivent vraiment, qui bougent, qui travaillent, qui sont dynamiques. C’est pour eux, qu’elle se transforme. Tous les travaux engagés sont enthousiasmants : pas seulement les terrasses, pas seulement les places, pas seulement les constructions, mais aussi les circulations. Voir ainsi l’asphalte et les trottoirs, ouverts partout par des trous immenses pendant des mois ; les plots jaunes et les blocs de bétons envahir triomphalement chaque rue et chaque carrefour ; les feux tricolores et les panneaux de signalisation déplacés, remplacés, rafistolés au scotch et à la rubalise en une merveille d’art contemporain in situ à l’échelle de la ville entière, qui symbolise la précarité de la civilisation urbaine… tout cela démontre une énergie formidable, une dynamique incroyable, à l’œuvre partout simultanément. Les Parisiens bénéficient pleinement de ce fourmillement, qui agit directement sur leur propre activité : presque malgré eux, ils développent des trésors d’imagination pour s’adapter à ce monde en mouvement chaotique perpétuel qui les fait sortir de leur zone de confort. Quelle chance ils ont de vivre dans une telle agitation positive !

Que Paris est plus agréable maintenant que la voiture est officiellement désignée comme l’ennemi à abattre ! La plupart de ces travaux visent en effet à la bannir, elle et surtout ses conducteurs criminels, pour créer une ville enfin apaisée. Posséder – ou ne serait-ce que conduire – une voiture est un crime contre l’humanité : rien ne justifie un comportement si égoïste, si individualiste, si attentatoire à l’environnement. Vélos et trottinettes électriques sont l’avenir de Paris. Ils doivent être privilégiés et leurs conducteurs choyés et encouragés, puisqu’ils sont vertueux, par nature quoi qu’ils fassent ; ils n’ont besoin d’aucune règle, d’aucun code de conduite (comme si le code de la route était fait pour tout le monde – et puis quoi encore !), puisqu’ils agissent pour le bien de l’humanité en conduisant des engins propres et sans danger. Ils sont l’avenir de l’humanité, comme ils sont le présent de la rue de Rivoli, entièrement consacrée à leurs déambulations (je n’ai d’ailleurs pas beaucoup entendu se plaindre les rares commerces qui y sont encore ouverts), ou des quais de Seine sur lesquels les deux cyclistes qui passent chaque heure se rient de ces nigauds d’automobilistes qui s’entassent dans des bouchons interminables.

Grâce à eux, Paris est promise à un avenir écologique exemplaire. Grâce à eux, et aux courageuses actions de végétalisation d’une ville beaucoup trop minérale. L’écologie urbaine n’est pas un oxymore : qui, mieux que les urbains, peut comprendre les besoins environnementaux ? Pieds d’arbres laissés à la responsabilité des riverains qui y font pousser toutes sortes de plantes, dans un joyeux capharnaüm créatif et biodiversitaire ; arbres en pots pour rendre un peu de nature à des places terriblement inhumaines ; projets visionnaires de forêts urbaines pour créer des poumons verts plantés sur les bitumes et le gruyère du sous-sol parisien… la campagne vient à Paris ! Et tant pis pour les scientifiques ronchons qui ne voient l’écologie que par leur bout de la lorgnette : à Paris, on assume que l’écologie ne soit pas scientifique mais politique !

Parce que ce qui compte, c’est que tout le monde en profite à sa manière : vu les prix de l’immobilier (auxquels la pauvre Anne Hidalgo, bien sûr, ne peut rien !), les trentenaires actifs en bonne santé à haut revenu et si possible sans enfant, bien entendu ! Mais aussi, sans doute ?, tous les autres, dans la promotion d’une véritable mixité sociale et culturelle qui fait, par exemple, cohabiter joyeusement toxicomanes, familles, dealers et enfants dans les parcs et devant les écoles maternelles, comme à Stalingrad, vitrine du vivre-ensemble.

Quant à ceux qui ne veulent pas faire l’effort de trouver leur compte dans cette ville enfin moderne, les un-peu-plus-vieux et les très-jeunes, les cacochymes et les valétudinaires, les malades et les douloureux, les bancroches et les handicapés, les blessés et les fatigués, les ouvriers et les artisans, les parents-à-poussettes et les piétons-à-pieds, les incompétents-de-la-bicyclette et les allergiques-de-la-trottinette, les banlieusards-qui-traversent-Paris-en-voiture et les provinciaux-qui-viennent-de-temps-en-temps-pour-le-boulot-ou-garder-leurs-petits-enfants, les illettrés-du-numérique et les incapables-des-gadgets-technologiques, les pauvres et les miséreux, les accidentés-de-la vie et les oubliés-du-monde… (liste non exhaustive et non contractuelle), en un mot, les losers, je l’ai dit : ils peuvent quitter Paris, personne ne les retient – l’équipe municipale moins que quiconque. Après tout, c’est ça, une ville inclusive, non ?

*

Anne Hidalgo est formidable ! Français, nous avons une chance extraordinaire. Elle a su mobiliser toutes les forces de la capitale pour la transformer radicalement. Elle a démontré ses qualités d’excellente gouvernante en refusant de se laisser enfermer dans des logiques purement comptables de maîtrise de la dette et des budgets, préférant s’engager dans des projets ambitieux, même quand ils étaient voués à l’échec ; en ralliant à elle une coalition fougueuse et presque toujours concentrée sur le seul intérêt général de ses électeurs ; et en mettant en place, dans l’administration parisienne, une organisation moderne, agile et inclusive – que seuls les imbéciles peuvent trouver « bordélique ». Très à l’écoute des citoyens, elle tient compte de leurs remarques positives et s’est entourée d’une équipe constituée d’individus connaissant des gens proches du terrain et des besoins concrets et réels des administrés. Anne Hidalgo est une chance pour Paris, elle est une chance pour la France !

Cincinnatus, 13 septembre 2021

Publié par

Cincinnatus

Moraliste (presque) pas moralisateur, misanthrope humaniste, républicain râleur, universaliste lucide, défenseur de causes perdues et de la laïcité, je laisse dans ces carnets les traces de mes réflexions : philosophie, politique, actualité, culture…

2 réflexions au sujet de “Anne Hidalgo et #SaccageParis”

  1. Le terme ”losers” est ”has been”, approprions nous le français en utilisant les mots de notre cher président ĺes célèbres ”gens qui ne sont rien” !

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