
L’idée revient aussi régulièrement que les marronniers journalistiques sur le classement des hôpitaux ou les réseaux secrets des francs-maçons : taxons les riches ! Pour financer les retraites, la transition écologique, le remboursement de la dette ou le sauvetage des services publics, ponctionner les plus riches paraît à certains intellectuels, militants et dirigeants politiques la solution à tous les maux de la société – ceci dit, pour d’autres, c’est la suppression pure et simple des impôts ou encore le développement d’applis… personne, visiblement, n’a le monopole du simplisme.
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1 %. Voire 0,1 %. Le haut du gratin du panier qui mange du caviar au petit-dèj, fume des cigares en peau séchée d’ouvrier et gagne un million à chaque éternuement. Les « milliardaires », les « très-riches », les « super-riches », les « hyper-riches », les « ultra-riches »… ces « parasites » sont accusés et, dans le même souffle et sans appel, jugés coupables de tout et du reste par les Fouquier-Tinville modernes. Selon les sources et le moment, ils concentreraient la moitié, les deux tiers, les trois quarts de la richesse mondiale ; seraient responsables de la moitié, des deux tiers, des trois quarts des émissions de gaz à effet de serre ; mangeraient la moitié, les deux tiers, les trois quarts des chatons du monde… Bref, la fabrique du Méchant tourne à plein régime afin de construire de toute pièce le bouc émissaire idéal pour tous ceux qui se gargarisent d’incarner la seule-vraie-gauche-de-gauche et ont renoncé à améliorer concrètement les conditions de vie des plus faibles ou à agir réellement contre la catastrophe climatique.
Le mélange malsain de jugements moraux et de condamnations politiques masque difficilement le puritanisme plein de ressentiment qui sourd de ces discours fielleux. « Regardez comme je suis vertueux comparé à ces vipères lubriques ! », clament haut et fort ceux dont les turpitudes déshonorent régulièrement l’espace sacré du Parlement et avilissent le politique. Que l’on y adhérât ou non, la dialectique de la lutte des classes avait au moins pour elle une puissance argumentative fondée sur une lecture de l’histoire qui méritait discussion. La bouillie que les descendants dégénérés de Marx et Engels débitent leur aurait valu des coups de pied au derrière de la part de toutes les générations antérieures de penseurs de gauche, quelles que fussent leurs obédiences et chapelles.
Ainsi a-t-on même pu entendre récemment la crème de la crème de l’opposition politique expliquer sérieusement que les milliardaires se fabriquent des bunkers de luxe pour se protéger du changement climatique et se préparent à quitter la planète dans des vaisseaux spatiaux. Si le ridicule tuait, les plus riches n’auraient plus guère d’adversaires. Quelle étrange stratégie contre-productive : non seulement ces excès ratent leur cible mais en plus ils réussissent l’exploit de rendre les riches sympathiques aux pauvres !
Au contraire, la critique devrait s’abstenir de tout ressentiment et n’être guidée que par la raison et l’intérêt général. Et là, il y aurait à dire sur les « riches » !
Il y aurait à dire sur les nombreux cadeaux fiscaux qu’ils ont reçus depuis quelques décennies par les gouvernants qui les ont choyés, au détriment du reste des Français ; sur la baisse régulière de leurs impôts ; sur la suppression de l’ISF…
Il y aurait à dire sur l’optimisation et l’évasion fiscales ; sur l’impunité qui règne en la matière ; sur le ridicule des moyens mis par l’État pour lutter contre ces crimes envers l’intérêt général, en regard des armées d’avocats mobilisés pour voler l’argent qui devrait, en toute justice fiscale, revenir dans le pot commun…
Il y aurait à dire sur les bulles d’entre-soi dans lesquelles vivent des ploutocrates apatrides entre salons VIP d’aéroports internationaux et chambres d’hôtels de luxe standardisées ; sur l’absence complète de sentiment d’appartenance au pays auquel ils doivent pourtant tout ; sur leur hypocrisie à profiter, lorsqu’ils en ont besoin, de ses services publics qu’ils participent sciemment à saigner…
Il y aurait à dire sur la spectacularisation de modes de vie entièrement voués à l’argent ; sur la promotion médiatique de l’hybris et de cette vulgarité ostensible propres à l’excès de fric ; sur le culte du dieu-pognon vendu à tous comme seul et formidable modèle de vie…
Il y aurait à dire sur la déconnexion du réel ; sur le mépris du peuple ; sur l’auto-exclusion du monde commun…
Il y aurait à dire sur la servilité des courtisans ; sur la corruption des politiques ; sur le népotisme des puissants…
Mais la moraline a remplacé le politique ; et la critique a perdu la raison.
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20 %. Le cinquième le plus riche de la population. Ce sont ses membres que cible Christophe Guilluy dans son dernier livre, Les Dépossédés [1]. Selon le géographe et essayiste, la concentration de l’attention sur le 1 % sert avant tout de leurre pour ne pas s’intéresser aux 20 % qui feraient volontairement sécession. Guilluy décrit une classe sociale qui promeut volontiers les valeurs du « vivre-ensemble », de « l’inclusion » (ou « inclusivité », on ne sait plus très bien où en est la novlangue dans le n’importe quoi), de l’écologie, de l’immigration, etc. etc., mais dont les membres seraient en réalité les rois de l’hypocrisie. En effet, ils pratiqueraient l’entre-soi aussi fermement que les « ultra-riches », mettraient systématiquement leurs enfants dans le privé, se regroupant entre bobos dans les centres-villes et dans leurs lieux de villégiatures, territoires qu’ils conquerraient ainsi, y compris et surtout en province, et dont ils excluraient les classes moyennes et populaires grâce à leur fort pouvoir d’achat. Ils contrôleraient également les médias, par lesquels ils imposeraient leur mode de vie et leurs comportements comme modèle, et culpabiliseraient les classes sociales inférieures à grands coups de moraline.
Il y a toujours pas mal de vérité et de justesse dans les réflexions de Christophe Guilluy. Dans son dernier ouvrage, comme dans les précédents, ses intuitions et fulgurances peuvent être brillantes : ainsi, par exemple, de ses démonstrations de l’inclusion complexe mais réelle des banlieues dans l’économie et la mondialisation, de son analyse des mises en scène du phénomène des « transfuges de classes », de ses réquisitoires contre la déshumanisation technocratique, de ses critiques du « wokisme » et de ses liens organiques avec la société spectaculaire-marchande, ou encore de ce qu’il appelle « le parti de la brume ». Ses travaux réguliers et successifs sur la « France périphérique » sont féconds et, si l’on peut lui reprocher d’exploiter toujours le même filon sans beaucoup se renouveler d’un livre à l’autre, il faut lui reconnaître sa constance et l’approfondissement de sa pensée avec le temps. Il a raison lorsqu’il constate que la « France périphérique » est bien la grande oubliée du monde politico-médiatique, dans lequel les bobos donneurs de leçon, insupportables de suffisance, sont largement surreprésentés.
Néanmoins, la radicalisation de ses thèses, basée sur des généralisations et interprétations outrancières et orientées des statistiques et sur l’explication exorbitante de comportements par des intentions univoques et donc trop simplistes, chavire parfois dans la caricature et le conduit dans des impasses. Rassembler 20 % des presque 70 millions de Français – soit un peu moins de 14 millions de personnes, quand même ! – dans la description monolithique qu’il en fait n’a pas de sens. Les 20 % les plus riches ne sont pas tous des bobos trentenaires de centre-ville qui prennent chaque matin leur vélo pour aller diriger leur start-up, font leurs courses tous les samedis chez Biocoop, paient un SMIC pour que leurs enfants soient protégés des prolos idiots et des méchants immigrés à Notre-Dame-De-La-Bonne-Fortune-Surtout-La-Mienne, partent tous les week-ends en SUV électrique dans leur résidence secondaire en Bourgogne ou Aquitaine, où ils ont chassé tous les gueux qui les emmerdaient avec leurs coqs qui gueulent le matin alors qu’ils voudraient bien dormir mais vont quand même chercher leurs œufs frais à la ferme dans le village d’à-côté et n’hésitent pas à donner des leçons aux agriculteurs du coin sur la dernière charlatanerie biodynamique à la mode… Bref, vous voyez le genre.
Ces personnages existent bel et bien (nous en connaissons tous) de manière plus ou moins grotesque. Mais le réel est toujours plus complexe. Surtout, partir du principe qu’il y a une unanimité des volontés individuelles qui donne corps à une volonté de classe dans ce bloc des 20 %, c’est prendre ses désirs pour la réalité et céder à la tendance lourde de notre époque à se fabriquer des boucs émissaires pour mieux exhiber sa bonne conscience. Déjà, le fameux 1 % regroupe des réalités bien différentes même si une sorte d’éthos de classe reste perceptible ; mais imaginer que le cinquième de la population française montre une homogénéité sociologique et idéologique suffisante pour les généralisations auxquelles Guilluy se laisse, hélas, aller, dessert le reste du propos pourtant non dénué d’intérêt.
Par exemple, lorsqu’il interprète le succès de l’école privée chez ceux qui peuvent se permettre d’y faire appel comme une démonstration de la volonté d’entre-soi et de la haine qu’éprouverait cette bourgeoisie à l’égard du peuple et des immigrés, il me semble se fourvoyer complétement. Sans doute le mépris de classe, ou une forme presque sectaire de snobisme, et une certaine xénophobie président-ils aux décisions de certains clients de l’école privée. Mais pour la plupart des parents d’élèves, il s’agit surtout d’une décision, souvent difficile, de sauve-qui-peut devant l’effondrement de l’institution scolaire tant en termes d’instruction que de sécurité.
Je l’ai déjà écrit, je le répète : en tant que citoyen républicain, je défendrai toujours l’école publique et je milite même pour l’abrogation de tous les soutiens et financements publics directs et indirects à l’école privée, y compris, bien sûr, la loi Debré (on m’accusera de vouloir rallumer la « guerre scolaire » ? chiche !) ; en revanche, en tant que parent, si j’ai le moindre doute sur la qualité de l’instruction donnée à ma fille ou sur sa sécurité physique et les conditions dans lesquelles elle suit sa scolarité, je n’hésiterai pas un instant à faire ce qu’il faut pour lui assurer le meilleur avenir possible – jamais je ne sacrifierai ma fille sur l’autel de mes principes. Ce raisonnement, combien de parents l’ont-ils tenu avant de choisir l’école privée ?
Cet égoïsme-là, qui fait passer l’avenir de ses propres enfants avant tout, peut être critiqué pour être contradictoire de la vertu civique, soit. Mais en faire un marqueur de classe est une erreur : il n’y a pas de honte à vouloir le meilleur pour ses enfants. Combien de prolétaires feraient le même choix s’ils en avaient les moyens financiers ? Tous, ou presque, sans aucun doute ! Il en va de même du logement, des modes de consommation, et de tout le reste : tout le monde aspire à mieux. Ces comportements ne résultent pas d’une volonté factieuse de séparation par une fraction de la société, alors que le reste du peuple, d’une vertu sans tache, ne désirerait que la concorde nationale.
Christophe Guilluy partage avec un autre penseur contemporain de grande qualité, Jean-Claude Michéa, une admiration justifiée pour George Orwell qui, parfois, les égare. Le fantasme de la décence commune en fait partie. Savoir si les intuitions et observations d’Orwell ont pu avoir du sens à son époque n’est pas la question ; la croyance en une moralité fondamentale des classes populaires actuelles n’est quant à elle qu’un vœu pieux. Elle repose, en outre, sur une définition du peuple sujette à caution. Quel critère pour décider si untel ou untel y appartient ? les revenus ? le patrimoine ? l’école dans laquelle vont les enfants ? la couleur du bulletin de vote ? Cette segmentation ne rappelle que trop les marketeux politiques qui tronçonnent la société française en parts de marchés et les identitaires qui divisent la nation entre Camp du Bien© et Camp du Mal© selon les assignations qui les arrangent pour faire fructifier leur petit business. Le peuple français ne saurait être confisqué ni amputé d’une part de ses membres, même pour les meilleures raisons du monde. Que cela nous plaise ou non, les Français qui appartiennent aux 20 %, et même au 1 %, en font partie.
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Si des comportements individuels ou collectifs sont politiquement condamnables, alors il faut les combattre politiquement – sans hésiter, le cas échéant, à taper comme un sourd… – mais pas se faire plaisir en créant des Méchants tout droit sortis de mauvais contes pour enfants. Et puis cesser de se servir, par paresse et démagogie, de l’impôt comme d’une punition.
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En ces matières, l’aspiration primordiale de tous est la justice. Pour les individus comme pour les entreprises, l’impôt doit être compréhensible et juste afin qu’il soit accepté et que la confiance existe. En tant que citoyen, je n’ai aucun problème à payer des impôts ; et, même si ça en choque, je suis prêt à en payer encore plus ! Si et seulement si : 1/ je comprends comment ils sont calculés et 2/ je suis assuré que ceux qui gagnent moins que moi (« les pauvres ») en paient proportionnellement moins et ceux qui gagnent plus (« les riches ») en paient proportionnellement plus – et on appellerait cela « progressivité », une idée neuve !
Or aujourd’hui, l’ensemble des impôts et taxes, joujou préféré des technocrates, ressemble au fils monstrueux qu’auraient eu ensemble Kafka et Sade. Plus personne n’y comprend rien – ce qui demeure le meilleur moyen de fâcher tout le monde : la colère est légitime. Pire encore, la seule chose que l’on perçoit à peu près clairement, c’est que l’impôt n’est plus juste. Entre les nombreuses exceptions, exonérations et niches en tous genres, et l’impunité des fraudeurs, la colère a tout pour basculer dans la révolte.
D’une part, donc, le combat contre l’évasion et la fraude fiscales devrait être mené avec la plus grande volonté politique – ce qui manque cruellement ! Au contraire, nous subissons une véritable propagande qui excuse et encourage les délinquants fiscaux, en même temps que sont démantelés ou réduits à l’os les services de l’État responsables de l’instruction de ces dossiers et que les négociations bienveillantes avec les fraudeurs témoignent d’une forme avancée de corruption chez les politiques qui les inspirent. Avouons que le cadre international n’aide guère, entre les paradis fiscaux qui se gaussent du spectacle pitoyable des rodomontades régulières de gouvernements complices et l’aveuglement idéologique de l’Union européenne qui ne jure que par la concurrence non libre et faussée entre les États, tout particulièrement dans le domaine fiscal.
D’autre part, tout politique sérieux devrait proposer une remise à plat des différents impôts et taxes, de leurs taux, de leurs assiettes – et de leur existence – afin d’expliquer clairement aux Français qui devrait payer combien, sur quelle base et pour quelles conséquences. Les scénarios sont infinis, selon les visions du monde qui les dictent, et méritent d’être débattus dans l’espace public. Aux Français, ensuite, de décider lequel semble le plus juste. Comment, autrement, au point de rejet que nous avons collectivement atteint, rendre légitime l’impôt ?
Revenus et capital doivent être intelligemment imposés or les petits matamores démagogues rivalisent de bêtise dans le concours Lépine de la taxe la plus crétine. Les pires absurdités sont balancées avec une morgue et une assurance qui laissent sans voix. Ainsi des promesses de confiscation du patrimoine « des plus aisés », on y revient toujours. D’éminents dirigeants politiques, dont certains auraient été professeurs d’économie à l’université – preuve par l’exemple de l’état de décomposition avancée de l’université française – s’enorgueillissent de proposer de se servir dans la fortune de Bernard Arnaud. Quoique je n’aie aucune sympathie pour ce dernier et que je ne sois pas si grand économiste que lesdits cadors de la NUPES, j’ose émettre quelques doutes sur la faisabilité dudit projet, dans la mesure où le patrimoine du monsieur consiste pour une grande part en actions LVMH. La « solution » ainsi évoquée reviendrait à nationaliser l’entreprise de luxe… vaste programme, aurait commenté le Général, dans un sarcasme opportun (à choisir, mieux vaudrait sans doute (re)nationaliser EDF et GDF mais bon, l’énergie n’est sans doute pas la priorité des dirigeants dits écologistes qui ne sont plus, sur le sujet, à une trahison près).
Tout cela n’a aucun sens. Pour remettre un peu de sérieux dans ces histoires, concentrons-nous plutôt sur la simplification, la progressivité et donc la justice des impôts et taxes. Sans jamais oublier que l’impôt ne peut être un objectif en soi : il sert à assurer le fonctionnement de l’État et des services publics, et à consolider le lien social par les dispositifs de redistribution. Les droits de succession, par exemple, sont un véritable levier de justice fiscale et de redistribution à condition qu’ils soient eux-mêmes correctement équilibrés et intelligemment pensés. Car le « patrimoine » auquel les mêmes démagogues résument parfois la « richesse », peut recouvrir des réalités bien différentes : maison de famille ou juteux investissements immobiliers, entreprise fondée par les aïeux ou portefeuille d’actions et de produits financiers… ces subtilités et ces finesses, a priori étrangères aux considérations fiscales, déterminent pourtant la signification de la transmission et, par conséquent, l’acceptabilité (que ce mot est laid !) de l’impôt et la légitimité de la redistribution qu’il entraîne. D’où les questions fondamentales à reposer : qu’imposer ? à quels taux ? comment ?
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Les forces centripètes de coagulation à l’intérieur de bastions d’entre-soi dominent la société. Les « riches » ne sont pas les seuls à s’y soumettre volontairement : le citoyen est réduit à l’homme privé, c’est-à-dire, au sens propre, à l’homme privé de toutes ses dimensions autres que celle d’une identité figée, sclérosée, immuable et qui lui dicte tous ses comportements. L’aliénation s’avère très confortable ; on chérit ses chaînes plaquées or. Rien de plus reposant que de se conformer aux stéréotypes qu’on nous impose et qu’on accepte volontiers ; de s’enfermer dans des bulles exclusives, de plus en plus étroites. Les velléités de sécession de certains « riches » doivent être traitées de la même manière que les autres : aller chercher la racine, ne pas se contenter d’un effeuillage hypocrite devant des caméras complices.
Renouer avec la vertu civique semble une risible utopie. Pourtant, la rupture avec le culte du dieu-pognon n’a jamais été si nécessaire. L’indulgence est prônée au plus haut niveau politico-médiatique envers les « premiers de cordée » que les classes inférieures devraient chaque jour remercier chaleureusement de la manne qu’ils daignent faire ruisseler sur toute la société ; les enfants devraient « rêver de devenir milliardaires », selon le Président de la République – préférer qu’ils rêvent de savoir lire, écrire, compter et penser serait sans doute beaucoup trop ambitieux. L’argent devenu une valeur morale, le veau d’or se porte au mieux – merci pour lui. La haine des « riches » ne trouve donc pas sa source dans une volonté de le renverser, ni d’abattre le capitalisme – les autoproclamés « anticapitalistes », prêtres ascétiques de la moraline, petits Torquemada de salon et autres gauchistes contrariants ne sont que des hypocrites et les meilleurs agents du néolibéralisme, comme le montrent chaque jour les leaders rescapés de Mai 68 – mais seulement sur l’envie et la jalousie. La colère et la révolte sont des sentiments hautement politiques, l’envie et la jalousie ne sont que des passions puériles… raison pour laquelle elles inspirent si bien nos contemporains demeurés des adolescents mal grandis.
Renouer avec la vertu civique, donc, et avec les principes républicains : rendre leur sens au triptyque liberté, égalité fraternité, et aux concepts qui lui sont liés : laïcité, justice, solidarité, peuple, nation, patrie, universalisme, humanisme, dignité humaine, etc. Mais surtout les incarner dans des politiques publiques volontaristes qui réduisent efficacement les inégalités injustes (et non celles fondées sur l’effort, le travail et le mérite : là aussi la plus grande confusion règne) et retissent le lien entre les Français. Tout est à refaire en matières d’école, de logement, d’immigration, d’urbanisme, de sécurité, de destruction des ghettos et de guerre à l’extension du domaine du caïdat. Pour combattre les velléités de sécession des « riches » comme des autres, une seule politique serait efficace, bien qu’elle aille à rebours de l’air du temps : la République à chaque coin de rue.
Cincinnatus, 6 février 2023
[1] Christophe Guilluy, Les Dépossés, Flammarion, 2022.
Superbe article, merci !
J’ai entre autres beaucoup aimé votre avis nuancé sur le livre de Guilluy.
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