Vote = démocratie ?

Entendu sur une chaîne d’information en continu : « le vote c’est la démocratie et la démocratie c’est le vote ». Euh… ben non, pas du tout en fait !

Déjà, le vote, ce n’est pas du tout démocratique en soi. À l’origine, c’est le tirage au sort qui est démocratique. Le vote consiste soit à prendre une décision – dans ce cas il n’a pas grand-chose à voir avec la démocratie ou tout autre type de gouvernement : c’est une procédure liée à un groupe – soit à confier une fonction à quelqu’un. Dans ce cas, le but est de mettre en avant celui qui, du point de vue de chacun des votants, sera le mieux à même d’assumer la fonction. C’est-à-dire, désigner le meilleur. Or, en grec, les meilleurs, ça se dit aristoï. De fait, s’il faut vraiment choisir, le vote ressortit plutôt à l’aristocratie qu’à la démocratie. Je conseille à ce propos le classique de Bernard Manin, Les principes du gouvernement représentatif, dans lequel il développe largement cette idée dans toutes ses nuances.

Donc, le vote, ce n’est pas la démocratie.

Mais est-ce que la démocratie, c’est le vote ?

Non plus.

Pour aller très (trop) vite, on pourrait dire que la démocratie possède trois dimensions. La démocratie est une forme de gouvernement décrite dans toutes les typologies classiques, à côté de ou en opposition avec la monarchie, la tyrannie, l’aristocratie, l’oligarchie, etc. Plus profondément, depuis Tocqueville, elle désigne également un mouvement historique, celui de l’égalisation des conditions, portée par l’amour de l’égalité. Enfin, la démocratie consiste aussi en un espace public vivant, au sein duquel la parole et l’action de tous peuvent être mis en commun.

Comme quoi, la démocratie ne peut en aucun cas être ramenée au seul vote, rituel pourtant ô combien symbolique et important. Et ceux qui veulent l’y résumer ne font qu’encourager sciemment la confiscation du pouvoir par quelques-uns. N’oublions jamais la chute de la IIe République.

Cincinnatus, 27 novembre 2014