2022 : le carnaval des élections

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Le combat de Carnaval et de Carême, Pieter Brueghel l’Ancien (1559)

Nous sortons, enfin, de ce cycle d’élections qui devrait nous faire honte. Le rituel détourné en spectacle ne sert ni la démocratie ni la république mais les enterre dans l’indifférence générale. S’ouvre maintenant un nouveau quinquennat qui s’annonce bien pire encore que le précédent. Youpi.

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Faut-il vraiment retenir quelque chose de ces résultats politiquement pathétiques ? Essayons…

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D’abord, ce dont tout le monde semble se fiche : l’abstention record aux élections législatives.

Nous étions censés choisir nos représentants pour écrire et voter nos lois. Une bagatelle, n’est-ce pas ? D’ailleurs, plus de la moitié des électeurs a préféré rester chez soi. L’apathie générale pendant et après la campagne présidentielle ne pouvait guère entraîner un enthousiasme débridé pour celle qui a immédiatement suivi : rien d’étonnant, donc, à voir l’abstention croître de l’une à l’autre. J’ai déjà dit, à plusieurs reprises, ce que je pensais de l’abstention – ou plutôt des abstentions [1]. Car rassembler tous ceux qui ont refusé de voter dans une même catégorie de sous-citoyens témoigne surtout de l’arrogance et du mépris déplacés de celui qui fait de sa propre participation un miroir de sa vanité.

Certes, nombre d’abstentionnistes sont sans doute adeptes d’un rien-à-foutrisme désinvolte, excellents représentants de la culture de l’avachissement. La dépolitisation et la disparition de toute vertu civique sont une réalité dramatique chez bien des individus préférant le confort du consommateur à l’engagement du citoyen.

Mais il y a aussi derrière cette abstention un sentiment d’inutilité et d’impuissance face à un politique toujours plus asservi à des intérêts privés et à des puissances extrinsèques, qu’elles soient économique, étrangère, supranationale… La conviction est profonde et largement justifiée par l’expérience de plus de quarante ans de fausse alternance sans alternative que, quel que soit le parti au pouvoir, celui-ci appliquera de toute façon le même programme dicté par une idéologie antipolitique.

Mais il y a encore cette offre biaisée qui ne correspond pas aux lignes de fracture idéologiques et aux visions du monde qui structurent nos imaginaires collectifs. Les partis et les candidats qui se présentent aux suffrages ne représentent pas du tout les grandes familles de pensée politique ni, par conséquent, les différentes orientations possibles pour conduire la nation. Autrement dit, la représentation n’est pas une affaire de « ressemblance » entre mon député et moi mais de congruence entre nos principes, nos idées, nos conceptions de l’intérêt général. Or, si aucun candidat ne défend une vision de l’homme, de la société et du monde en accord, ni même seulement compatible, avec mes propres convictions, alors j’ai toute légitimité à refuser de participer à la mascarade. La multiplication des candidats ne traduit pas une diversité des idées et la vigueur d’une démocratie saine mais la simple concurrence entre des clones tristes et la prise en otage des citoyens sommés de jouer à un jeu dont les règles sont faussées.

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Dès le soir du premier tour des législatives, la macronie a donné le ton : oublié le front républicain, oublié le danger brun-d’extrême-droite-fasciste-les-heures-sombres-de-l’histoire, oubliée Marine Le Pen… le seul adversaire, c’était Jean-Luc Mélenchon et ses troupes. Au point d’user des artifices les plus grossiers d’une mauvaise série netflix avec la dramatisation d’un suspense préfabriqué. Les termes du psychodrame ont été tout de suite posés : le président réélu risquait de perdre ses législatives ! Dans cette perspective pire que les dix plaies d’Égypte, on a entendu des responsables politiques expliquer qu’une cohabitation ou qu’une majorité relative seraient une catastrophe – et même antidémocratiques. Mais franchement, n’ont-ils pas honte ?

Contre Mélenchon, le seul principe de la stratégie macronienne, le seul « élément de langage » asséné sans discontinuer sur tous les tons et plateaux de télé : agiter le chiffon rouge. À les en croire, Mélenchon, c’est Staline ; le programme de la NUPES, c’est les soviets sans l’électricité. « Extrême-gauche » voire « ultra-gauche » : la coalition de partis a immédiatement été renvoyée à une image de dangereux collectivistes, économiquement incompétents et dont le programme allait sans coup férir faire retourner la France en même temps au Moyen Âge et à l’URSS dans un chaos et une anarchie sans précédent.

Quelles foutaises !

Économiquement, le programme de la NUPES, presque identique à celui de 2017, n’a vraiment rien de révolutionnaire. Très très très loin du programme commun qui a mené François Mitterrand au pouvoir en 1981, il n’est finalement que caricaturalement néokeynésien, sans grande inventivité ni imagination, un peu naïf sans doute, mais globalement plus social-démocrate que socialiste aux sens propres des termes (si tant est que les mots aient encore un sens). L’enrobage électoraliste avec des promesses démagogiques et qui n’avaient guère de chance d’être tenues doit être critiqué… de la même manière que celui appliqué avec autant de zèle par tous les autres partis : LREM, RN, LR et autres n’ont pas fait autre chose, ils se sont seulement adressés à des électorats différents en leur promettant monts et merveilles. Nihil novi sub sole.

Il est en revanche plus intéressant de constater que le programme économique et social originel de LFI apparaisse très à gauche alors qu’il y a quarante ans (ou pire : un siècle), il aurait semblé fade. Le même mouvement tectonique de la vie politique française fait passer pour centristes des discours et politiques qui appartiennent traditionnellement au corpus idéologique de la droite. Tout se passe comme si l’ensemble du spectre politique se décalait vers la droite… avec toutefois un tassement à l’extrême-droite, celle-ci n’ayant plus grand-chose à voir avec celle du XXe siècle en ses différentes périodes – traiter le RN de « fasciste » ou de « nazi » est un contresens qui sert seulement à se donner bonne conscience à peu de frais : comme en ce qui concerne la NUPES, les attaques loupent leur cible. La preuve en a été donnée hier soir.

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Alors pourquoi adopter cette stratégie contre Mélenchon et sa coalition ?

D’abord, parce que le spectre politique se resserre pour se concentrer sur un éventail très étroit d’idées qui, peu ou prou, appartiennent toutes à (ou sont compatibles avec) l’idéologie néolibérale. Quant à celles qui semblent s’écarter, même légèrement, du dogme, leur hétérodoxie les condamne au bûcher des hérésies idéologiques.

Ensuite, et surtout, parce que le réel, on s’en contrefout. Ce qui compte, c’est d’appuyer là où on croit qu’on a mal. Malgré une finesse digne d’une Panzerdivision à la charge, l’efficacité de la posture antimélenchonienne est largement éprouvée pour effrayer le bourgeois et flatter tous ceux qui, votant pour la macronie, se réconfortent d’appartenir au « cercle de la raison ». « Raisonnable » : voilà ce que doit être l’extrême-centre, à équidistance des deux autres extrêmes considérés aussi dangereux l’un que l’autre… alors qu’il n’en était pas de même lorsqu’il s’agissait d’appeler les électeurs de LFI à voter Macron contre Le Pen. Mais ça, c’était une autre élection, il y a un mois et demi… une éternité.

Tout cela serait bien risible et anecdotique – un nouvel épisode de mauvaise foi et de tactique politicarde minable qui sera bien vite oublié tant il s’inscrit dans une très longue lignée à laquelle ont participé tous les mouvements politiques sans exception – si les macroniens, en choisissant cet angle d’attaque, ne passaient pas volontairement à côté des véritables faiblesses de la NUPES.

En effet, le danger que représentent LFI et la coalition de traîtres amputés de tout honneur et de toute colonne vertébrale idéologique qui se sont prostitués pour sauver leur siège réside bien moins dans leurs promesses économiques et sociales que dans l’évolution idéologique de LFI depuis 2017, et de certains de ses associés depuis plus longtemps encore. Les purges successives ayant vidé le mouvement de la ligne républicaine, laïque, souverainiste, au profit de la ligne identitaire des indigénistes, décoloniaux, intersectionnels…, les manifestations complices avec les pires islamistes, l’antisémitisme assumé… c’est là qu’il fallait frapper ! C’est pour ces raisons que la NUPES et Mélenchon sont indignes de diriger la France et salissent l’hémicycle.

Pourquoi n’avoir pas choisi cet angle ?
Sans doute parce que ça n’aurait pas marché !

D’abord, Macron et LREM eux-mêmes n’ont aucune crédibilité à parler de laïcité, de souveraineté nationale ou de républicanisme. Adeptes du concordat, européistes et néolibéraux, ils sont tout autant étrangers à la pensée républicaine que le sont leurs adversaires autoproclamés « de gauche » (mais qui en trahissent l’histoire, les principes et les références).

Ensuite, parce que le RN se serait fait un malin plaisir de dénoncer leurs forfaitures, bien que le républicanisme de Marine Le Pen et de son parti ne soit lui-même qu’un risible cache-sexe : les déclarations énamourées à la laïcité des prétendus patriotes ne trompent personne… ce qui ne les aurait pas empêchés une seconde de renvoyer le président et sa clique dans leurs buts. Et surtout, à s’en servir pour revenir sur le devant de la scène.

Pour résumer : les macroniens ont préféré diaboliser leur principal adversaire en fabriquant sur-mesure un épouvantail susceptible de mobiliser leur électorat supposé « raisonnable », plutôt que de risquer de raviver le RN en choisissant la laïcité et la république comme chevaux de bataille contre la NUPES – application finalement sage du célèbre adage si cher à feu Charles Pasqua qui s’y connaissait mieux que personne :

Quand le singe veut monter au cocotier, il faut qu’il ait les fesses propres.

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Aucun parti, aucune coalition ne sort gagnant de cette élection.

Pendant une semaine, la NUPES a fait semblant d’avoir gagné alors qu’au premier tour elle a obtenu un score inférieur à celui cumulé des candidats à la présidentielle ; inférieur, surtout, à celui réalisé par l’ensemble des partis de gauche au premier tour des législatives depuis 1981, à peu près au niveau de la claque historique de 2017 [2]. Ce qui signifie qu’en réalité, il n’y a eu aucune dynamique dans ce rassemblement qui a seulement réussi un coup de bluff : il devient le premier groupe d’opposition grâce à l’effet médiatique (rabâcher pendant des jours « la gauche, c’est nous », « l’opposition à Macron, c’est nous », etc.) et au clientélisme (bobos des centres-villes et territoires abandonnés de la République disputés avec le RN – j’y viens). Avec la campagne de Jean-Luc Mélenchon sur le thème « élisez-moi premier ministre », sa carrière s’achève dans un débordement d’hybris à la hauteur de la boursouflure égotique que nous avons dû subir depuis plusieurs années. Dommage que le tribun jadis républicain termine si bas.

Paradoxe amusant du scrutin uninominal à deux tours : la NUPES fait un score historiquement mauvais mais obtient un nombre inespéré de députés alors que le RN réalise son meilleur score, remporte un nombre record de députés mais échoue à s’imposer comme première force d’opposition à l’Assemblée – derrière la coalition « de gauche » elle-même menacée d’exploser en vol. La stratégie de la discrétion, choisie par Marine Le Pen a conduit aux mêmes résultats à la présidentielle et aux législatives : des scores sans précédent mais encore insuffisants. Jusqu’à la prochaine fois ? Il serait peut-être temps de réfléchir aux raisons pour lesquelles tant de Français votent pour la petite entreprise familiale lepéniste, avant qu’elle n’accède au pouvoir.

Quant à LR, comme le PS, sa longue agonie n’en finit pas. Mieux : il va se retrouver dans la position de ces petits partis centristes qui, longtemps, ont eu une importance politique inversement proportionnelle à leur poids électoral, simplement parce qu’ils ont su se montrer indispensables pour former des majorités. En effet, LREM et ses alliés se sont pris une veste et n’ont qu’une majorité relative. Ainsi Macron doit-il compter sur le bon-vouloir de l’autre parti de droite comme supplétif nécessaire à son armée de clones décérébrés, comme jadis le RPR devait compter sur l’UDF. Paradoxalement, c’est peut-être même une chance pour le président qui va pouvoir mener sa politique en se défaussant sur LR comme alibi pour justifier l’ampleur des purges… un comble !

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Pas plus que les forces politiques en présence, la nation ne sort grandie de ces élections. Au contraire : plus fragmentée que jamais, elle expose ses souffrances à la cécité du monde politique. Les fractures sociales et territoriales se sont à la fois accrues et révélées. Sans verser dans une sociologie électorale de PMU après trois rosés pas frais – souvent plus pertinente, d’ailleurs, que les gloses creuses des cuistres éditorialistes qui pontifient sur toutes les chaînes de télévision, stations de radio et réseaux dits sociaux – on ne peut qu’être affligé par la façon dont chaque parti a cherché à rassembler son électorat sans parler au peuple français dans son ensemble.

La segmentation marketing de la nation est dorénavant un lieu commun, au sens fort du terme : une évidence partagée aussi bien par les dirigeants politiques que par les électeurs eux-mêmes. Dans une espèce de Yalta caricatural, chacun a tenté d’optimiser sa part de gâteau en mobilisant ses troupes à partir d’éléments de langage censés provoquer des réflexes pavloviens de rejet de l’autre.

LREM rassemble les gagnants de la mondialisation et les couches sociales à l’abri de l’inquiétude : bourgeois des hypercentres-villes, retraités aisés, jeunes cadres acquis à la strat-up nation qui confondent la France et la Californie, élites apatrides qui haïssent leur pays sans même le connaître vraiment… Néanmoins, dire que Macron est le candidat-président des riches est vrai mais n’est pas juste : il n’est pas que celui des riches. Il est aussi celui de tous ceux qui, ouvertement ou à demi-mot, rêvent d’appartenir à l’une des catégories précédentes ou craignent, sentiment bien légitime, de voir leur situation – parfois peu enviable – empirer encore.

La drague de la NUPES envers les autoproclamés « nouveaux damnés de la Terre » – stratégie dite de Terra Nova – a parfaitement fonctionné. Le basculement de Mélenchon dans l’identitarisme lui fait faire le plein dans les quartiers dits « sensibles », où les accommodements déraisonnables avec les mafias religieuses lui assurent la rente électorale du lumpencaïdat, en même temps qu’il séduit le fameux « camp du Bien© » bobo-écolo-bien-pensant-woke. Cette « gauche-coucou » a beau faire un score historiquement bas en pourcentage, elle s’illusionne sur sa victoire et continue de déverser sa moraline depuis les sommets de sa bêtise et de ses trahisons [3]. Que les classes populaires et moyennes inférieures qui survivent dans la France périphérique s’en détournent de plus en plus ne l’inquiète pas : au contraire, ça la conforte puisque le peuple, c’est sale, ça pue et ce sont tous des fachos ! Quel retournement de veste depuis la campagne « populiste » de 2017 qui cherchait à parler au peuple dans son ensemble [4] !

Et dans cette France périphérique du périurbain subi, des quartiers populaires oubliés de la mondialisation comme des trafics, dans cette France qui souffre, méprisée par les néolibéraux pur jus du macronisme et par les identitaires mélenchoniens, c’est le RN qui développe patiemment son business. De mieux en mieux implanté, il propage ses métastases et, avec la complicité objective de ses adversaires, poursuit son travail de persuasion. S’il s’ancre dans les villes et dans les villages, il s’implante plus encore dans les esprits, avec ses réponses fausses à des questions justes que les autres ne daignent même pas entendre. Quelle honte d’abandonner ainsi au RN les questions fondamentales de la laïcité, de la nation, du peuple, de la souveraineté, de l’immigration, etc. etc. Et, surtout, de le laisser dérouler sur tous ces sujets mensonges et contresens.

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Quelle tristesse de voir l’Assemblée nationale transformée en grand barnum. La crise de la représentation est profonde et se manifeste à tous les niveaux. Déjà vidée de tout pouvoir, rétrécie, humiliée, la représentation nationale n’est qu’une illusion de démocratie. Il y a bien longtemps que nos institutions n’ont plus rien de « démocratique ». La Constitution de la Ve a tant de fois été opérée, amputée, greffée et charcutée qu’elle ressemble au monstre de Frankenstein, le souffle de vie en moins. Le législatif ne légifère plus et se soumet bien volontiers au sadisme de l’exécutif, les députés ne servent qu’à alimenter le divertissement, à divertir les foules par l’affligeant spectacle qu’ils offrent de l’effondrement du politique [5].

Les commentaires et rodomontades entendues jusqu’à hier soir encore de personnalités entrant maintenant au palais Bourbon devraient scandaliser tous les citoyens : l’incompétence des nouveaux venus en matière législative et institutionnelle, quoiqu’inquiétante, n’est pas un problème en soi. En revanche, l’irrespect revendiqué pour les institutions est une faute impardonnable. Prétendre « installer le chaos » à l’Assemblée, annoncer que « tout sera fait » pour empêcher le travail de tel ou tel ministre, non pour des raisons politiques, mais au nom d’une conception de la justice qui fait fi de l’État de droit et cherche à réinstaurer la vengeance tribale, enchaîner les déclarations ouvertement antirépublicaines et piétiner volontairement les institutions : tout cela est grave venant d’un citoyen, insupportable lorsque c’est un élu de la nation qui s’y adonne. Le « fascisme » peut aussi se trouver dans l’esprit de ceux qui n’ont que ce mot à la bouche.

La campagne présidentielle fut trumpienne ; dorénavant, c’est toute notre vie politique qui sombre dans un grand-guignol où règnent la bêtise et la violence. Nous sommes gouvernés par des imbéciles arrogants, quel que soit leur parti. Nous rions du niveau catastrophique de ces dirigeants politiques incultes, stupides et bornés, purs produits de la vanité narcissique des réseaux dits sociaux et de la téléréalité… sans nous rendre compte qu’à force de répéter le mensonge selon lequel il faudrait voter pour qui nous ressemble, nous élisons bel bien des députés de pacotille qui nous ressemblent vraiment.

Vautrés dans la culture de l’avachissement, ayant laissé loin dernière nous toute forme de décence commune et de vertu civique, préférant le confort privé et les chaînes du consommateur passif à la liberté et à l’engagement du citoyen, sans doute méritons-nous notre sort.

Cincinnatus, 20 juin 2022


[1] Voir notamment la fin du billet « Et maintenant ? », publié entre les deux tours de l’élection présidentielle. Le philosophe Robert Redeker a, quant à lui, fait paraître la semaine dernière une tribune intéressante, hélas réservée aux abonnés au Figaro : « Le silence des urnes répond à l’assèchement du destin de la France ».

[2] Pour les amoureux de données électorales, je conseille l’excellent site de Laurent de Boissieu : https://www.france-politique.fr/.

[3] La semaine dernière, sa campagne auprès des « jeunes » sur fond de conflit de génération a atteint les pires bas-fonds de la putasserie, rivalisant dans le domaine avec celle du parti présidentiel. Les accusations directes envers les « vieux » de « voler leur avenir aux jeunes », « de détruire la planète » ou que sais-je encore, et les petites « blagues » sur l’intérêt de la canicule – sous-entendant clairement que la mort de nombreuses personnes âgées serait une bonne chose – ont montré toute l’ignominie de cette classe politique et des militants fanatisés qui ont abandonné tout honneur et toute dignité. De toutes les fractures qui traversent la nation française, cette détestation générationnelle est sans doute l’une des plus inquiétante : elle montre combien la transmission et la décence commune ont disparu. Sur ce sujet, voir les billets « Ok boomer ! » et « Les vieux ».

[4] Pour être tout à fait juste, il faut citer le cas isolé de François Ruffin qui, malgré ses très nombreux défauts, a le mérite de maintenir cette ligne politique au sein de la NUPES. Il sera sans doute vite marginalisé dans le futur groupe parlementaire, s’il ne passe pas par-dessus bord lors de la prochaine purge : nombreuses sont déjà les hyènes du parti à le considérer comme un « facho » infiltré.

[5] Il y a, sur les différents bancs de cette nouvelle Assemblée, quelques rares figures qui sauvent l’honneur de la représentation nationale. Leur tâche va être immense pour ne pas la laisser s’abîmer dans l’indignité. Je leur souhaite bonne chance – même si je doute de la possibilité même de leur succès.

Publié par

Cincinnatus

Moraliste (presque) pas moralisateur, misanthrope humaniste, républicain râleur, universaliste lucide, défenseur de causes perdues et de la laïcité, je laisse dans ces carnets les traces de mes réflexions : philosophie, politique, actualité, culture…

2 réflexions au sujet de “2022 : le carnaval des élections”

  1. Votre prose est un régal désespérant.
    Mais elle aussi de plus en plus souvent pour moi un antidote contre la falsification du réel.
    J’en viens maintenant parfois ( moi, citoyen au sens « intéressé par la chose politique » ) à douter de mon propre ressenti sur la contemplation du spectacle politique . Les mensonges sont devenus si gros, énoncés avec un tel toupet , à une cadence si forcenée et entrainant si peu de réaction, que le spectateur de ce champ de ruine qu’est devenue la vie politique française peut se sentir pris d’un vertige et en arriver à se demander si ce qu’il considère comme sa normalité ou plutôt sa référence ( disons la politique pèpère de ma jeunesse, les années Mitterrand pour faire simples ) n’ait jamais existé. Certes, c’était déjà des bandits, mais au moins avaient-ils encore de la culture et une certaine classe pour nous escroquer. Là, nous sommes dépouillés de nos droits politiques par la lie de l’humanité. Il n’y a qu’à voir leur dernier recrutement au poste de porte parole ( dont je n’ai même pas encore retenu son nom ) : vulgaire, sûre d’elle même, d’une mauvaise foi sans borne… Elle va sans doute réaliser l’exploit de me faire regretter Gabi le bel éphèbe…
    Et que dire de Dupont Moreti qui maintenant tapine en faisant des oeillades aux députés RN !!! Cet homme n’a-t-il donc aucune vergogne ( certes, il est avocat… ) ? Mais quelle indignité comme aurait dit l’autre…
    Toute décence semble avoir quitté le corps politique.
    J’en viens sincèrement depuis ce matin à regretter d’être allé voter hier…

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  2. « La société du spectacle », la fin de la politique, de la République, la numérisation de la vie et son empêchement, la célébration de la machine, l’obsession du même, la disparition de l’Autre sous de fausses identités, autrement dit la transition sans ménagement vers la destruction du monde.
    Bon, faut que je recharge ma trottinette, mes écrans, mes mots de passe oubliés…!

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