Le football, nouvel opium du peuple

La passion du foot m’atterre. Quel intérêt à regarder vingt-deux millionnaires incultes et arrogants, qui plus est exilés fiscaux, jouer à la baballe ? La vulgarité du pognon-roi s’étale sans pudeur sur tous les écrans, dans un divertissement décérébrant. Le foot est bien le nouvel opium du peuple, la transcendance de la religion en moins. Du pain et des jeux : aujourd’hui que certains n’ont pas assez de pain, donnons-leur plus de jeux ! ça les calmera. Il s’agit bien de divertir, c’est-à-dire de tourner d’un autre côté, de détourner, d’écarter – merci Littré. Pendant qu’ils sont devant la télé à hurler, ils oublient de penser.

Une colonne supporte un plafond mais que supporte le « supporteur » ? Toujours d’après ce bon Littré, un supporteur est « un appareil destiné à soutenir l’abdomen dont les parois sont distendues ou relâchées accidentellement » ! Combien de grands sportifs de canapé, avachis dans les miettes de chips auraient besoin d’un vrai supporteur pour soutenir leur abdomen nourri à la bière ?

Il soutient son équipe, souvent celle de sa ville. Mais quel lien réel possèdent les joueurs en question avec ladite ville ? Combien y ont grandi, y ont vécu, y sont attachés depuis plus longtemps que les quelques saisons pour lesquelles ils ont signé un contrat exorbitant avec un club ? En quoi telle équipe est-elle vraiment celle de la ville, alors que dans deux ou trois ans, la plupart de ces mercenaires auront changé d’équipe et « défendront » une autre ville ? Pure illusion à laquelle le fan veut croire.

Après tout, elle n’est rien en regard du vrai scandale que masquent mal les justifications grandiloquentes qui en appellent au sport, à sa beauté, à sa noblesse, à son honneur : quelle hypocrisie ! Le football n’a rien à voir avec le sport mais tout à voir avec le fric. Des salaires des joueurs aux contrats avec les médias, en passant par le commerce des produits dérivés et des places de spectacle dans les stades, les termes de « business » et d’« industrie » ne rendent pas justice à ce système ahurissant, concentré chimiquement pur de la société spectaculaire-marchande de Debord et des situationnistes.

On me rétorquera que si le foot est pourri, ce n’est pas le cas des autres disciplines. Allons donc !
Les tennismen sont de bons citoyens qui paient leurs impôts en France ?
Les cyclistes ne livrent pas leur corps à des chimistes cupides pour gagner quelques secondes de course et perdre quelques années de vie ? (l’augmentation effrayante de la vitesse moyenne sur le tour de France depuis l’époque, déjà pourrie, où je le regardais avec mon grand-père n’est due, bien sûr, qu’à la qualité croissante de l’entraînement des coureurs !)
Les rugbymen sont l’incarnation du noble esprit du sport et n’ont jamais aucune arrière-pensée, pas même quand ils vendent leur image à de la soupe en boîte ou à des assurances ?
Le plaisir, le jeu, le sport disparaissent devant le pognon et le spectacle.

Ces grands sportifs, moitié héros modernes, moitié gladiateurs à l’antique, ont la plupart bénéficié pendant leur formation des infrastructures publiques : clubs, stades, médecins, sécurité sociale, bourses d’études, etc. Mais dès qu’ils accèdent au sommet, ils jugent tout à fait ringard et absurde de payer des impôts en France, et donc de participer au financement de ces mêmes services. Bénéficiaires de salaires obscènes – comment peut-on gagner des millions pour jouer au ballon ? –, leur égoïsme de sales gosses les retranche du commun, les fait sortir de la société dont ils ont bien profité. Le concept même de redistribution leur inspire un rictus de mépris.

Et le pire, c’est que les pauvres gens qui les admirent – pour quoi ? – leur pardonnent et leur donnent raison.

Que l’on ne me dise pas que tout cela est justifié parce qu’ils « vendent du rêve » ! Car c’est terriblement vrai, le football n’est rien d’autre qu’une marchandisation des rêves. Rêves à vendre : quelle société pousse l’idéologie de la rapacité à un tel cynisme ?
Ceux qui mettent en vente les rêves, qui en font un marché pour les échanger contre de l’argent ne méritent que de crever !

Cincinnatus,

Publié par

Cincinnatus

Moraliste (presque) pas moralisateur, misanthrope humaniste, républicain râleur, universaliste lucide, défenseur de causes perdues et de la laïcité, je laisse dans ces carnets les traces de mes réflexions : philosophie, politique, actualité, culture…

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