J’ai peur pour toi, ma fille

Eugène Manet et sa fille au jardin, Berthe Morisot (1883)

Voilà bientôt huit ans que tu es entrée par effraction dans ma vie. Huit ans que je te vois grandir avec une fascination mêlée des plus grandes joies et des plus grandes peurs… rien d’original, me diras-tu : les montagnes russes émotionnelles sont le lot de bien des parents. Mais aux succès et tracas quotidiens, s’ajoutent les espérances et les angoisses existentielles. Quand tu cours vers moi en criant « mon papa ! » et que tu te jettes dans mes bras, je t’étreins de toute mon âme… imagines-tu qu’alors, derrière le rideau de cheveux qui m’aveugle et m’étouffe de bonheur, résonnent en moi comme le memento mori susurré par l’esclave ces questions lancinantes qui ne me quittent pas depuis que tu existes : dans quel monde vivras-tu, mon enfant ? et surtout : qui devras-tu devenir pour l’habiter ?

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Notre patrimoine saccagé

Vue imaginaire de la Grande Galerie du Louvre en ruines, Hubert Robert (1796)

À chaque manifestation collective de joie ou de colère, une foule plus ou moins nombreuse se rassemble sur la place de la République à Paris puis laisse, dans son reflux, un monument violenté, sali, abîmé. La statue subit ainsi des détériorations, insupportables d’au moins trois points de vue : financier (les coûts des restaurations répétées pèsent indûment sur la collectivité alors que seuls les coupables devraient payer), patrimonial (le monument souffre de ces dégradations, chaque nettoyage érode un peu plus la pierre et certaines peintures utilisées dans les tags restent incrustées dans le bronze) et symbolique (souiller l’allégorie de la République témoigne d’une haine profonde de la France). Le symbole de la République devient ainsi celui de tout notre patrimoine, à la fois méprisé et saccagé.

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Les exclus du monde

À la porte de l’éternité, Vincent van Gogh (1890)

Vous qui êtes trop vieux pour « sortir de votre zone de confort », vous qui n’avez pas les moyens matériels de vous payer une connexion, vous qui ne souhaitez pas vous faire greffer un téléphone à votre main, vous qui n’avez pas envie d’être asservis à des gadgets technologiques ou qui, tout simplement, ne savez pas comment ils fonctionnent, vous qui êtes malades, bancroches, handicapés, blessés, fatigués, cacochymes, valétudinaires, pauvres, mal-foutus ou pas foutus-du-tout, trop-lents dans un monde trop rapide, vous tous qui ne voulez pas ou ne pouvez pas vous plier pas aux diktats de cette modernité tyrannique et n’entrez pas, par volonté ou nécessité, dans ses cadres, dans ses petites boîtes formatées, comme autant de lits de Procuste ; alors même qu’on nous bassine avec « l’inclusivité », ce barbarisme de la novlangue bien-pensante et moralisatrice, vous n’êtes pas seulement exclus de l’espace public privatisé, de ces territoires que les élus et les mafieux choisissent de réserver à leurs clientèles, à ceux qui leur ressemblent ou les servent : vous êtes exclus du monde lui-même.

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Les crises de l’autorité

La Mort de Socrate, Jacques-Louis David (1787)

Un député de la Nation frappe un proviseur adjoint de lycée et une CPE, il écope d’une amende de 5 000 euros… qu’il paie donc avec l’argent du contribuable. Voilà ce que vaut aujourd’hui l’autorité de l’institution scolaire : 5 000 euros et le mépris violent de la représentation nationale.
Un député de la Nation achète des drogues dures avec son indemnité parlementaire à un mineur, non seulement il ne démissionne pas mais il est même montré en exemple par son parti et n’écope que d’une peine de 1 000 euros… qu’il paie donc lui aussi avec l’argent du contribuable. Voilà ce que vaut aujourd’hui l’autorité de la loi : 1 000 euros et le mépris goguenard de la représentation nationale.
Et ainsi de suite, ad nauseam.

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La table rase

Portrait d’un vieillard et d’un jeune garçon, Domenico Ghirlandaio (1490)

En apparence, nihil novi sub sole : la guerre des Anciens et des Modernes, des vieux cons et des jeunes imbéciles, n’a jamais cessé et, génération après génération, le recyclage infini des postures fait des révolutionnaires d’hier les réactionnaires d’aujourd’hui. Il faut néanmoins délaisser l’écume pour s’intéresser aux profondeurs : la fracture générationnelle qui traverse notre société peut alors montrer quelques aspects inédits, tant dans sa nature que dans son ampleur. Rupture technologique, inculture assumée et volonté d’éradiquer symboliquement tout ce qui a précédé parce qu’identifié au Mal absolu convergent pour alimenter le fantasme de la tabula rasa.

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À la télé ce soir

Il y a quelque chose de pourri dans l’audiovisuel public. France Inter, France Info, France 5, Arte… et même France culture : les chaînes de télévision et radio du service public semblent avoir renoncé à l’impartialité et à l’objectivité pour se vautrer dans l’idéologie.

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Humains inhumains

Étude du corps humain, Francis Bacon (1949)

L’homme ne devient plus qu’un chiffre, la répétition de plus d’un éternel zéro.
Kierkegaard

Les terroristes islamistes du Hamas qui ont assassiné, massacré, violé, torturé, enlevé des hommes, des femmes, des enfants, des vieillards, le 7 octobre 2023 sont-ils humains ? L’homme qui a offert sa femme inconsciente aux viols de dizaines d’hommes et ces hommes eux-mêmes sont-ils humains ? La question d’une fraction de l’humanité qui, en réalité, n’en ferait pas partie revient à chaque nouveau drame exorbitant, à chaque fois que l’horreur atteint un niveau que nous ne savons ni ne voulons penser.

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L’inculture scientifique et la victoire des obscurantistes

Le Bonnet d’âne, Jean Geoffroy (1880)

Qu’il est triste, le pays de Descartes, de Pasteur, de Curie et de tant d’autres immenses bienfaiteurs de l’humanité ! Le niveau de la population française en sciences est lamentable. Les écoliers décrochent dans toutes les matières et dans les disciplines scientifiques tout particulièrement ; même les meilleurs élèves qui entrent dans les classes préparatoires (et, par conséquent, dans les grandes écoles d’ingénieurs, où le niveau en français, en histoire et en culture générale n’était déjà pas bien fameux il y a vingt ans… mais, au moins en mathématiques et en physique, ça se tenait encore à peu près) n’ont jamais été si mauvais en sciences. Quant au reste des Français, les connaissances fondamentales absolument nécessaires à l’honnête homme du XXIe siècle ont déserté ce qu’il reste de culture commune – pour le plus grand bonheur de tous les charlatans, obscurantistes et idéologues.

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Tout fout l’camp !

Stańczyk, Jan Matejko (1862)

Reviennent, sur le devant de la scène où se joue le navrant spectacle de l’humanité, de vieux fantômes que l’on croyait définitivement exorcisés. Mais enfin, quelle naïveté ! Comme s’ils avaient disparu tout ce temps et réapparaissaient miraculeusement ! Rien n’est jamais définitif avec l’homme, rien n’est jamais assuré. Rien. Si ce n’est sa capacité à s’enfoncer toujours plus bas dans l’obscur.

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Le passé manipulé

La Persistance de la mémoire, Salvador Dalí (1931)

Mensonges. Fantasmes. Simplifications. Manipulations. Instrumentalisations. Le passé et l’histoire subissent les pires infamies, sur fond d’inculture généralisée et d’idéologie à hauteur de teckel.

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